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LE
PÈLERINAGE À SAINT-JACQUES


Como chove mihudiño
Como mihudiño chove
Como chove mihudiño
Po la banda de Laino
Po la banda de Lestrobe [1].
(CHANT POPULAIRE GALICIEN.)


La diligence automobile part de la Corogne.

Une grosse, une lourde machine, noire et jaune, avec berlina, intérieur, impériale, et qui semble archaïque, malgré son très moderne moteur. Des têtes se penchent aux portières : têtes d’aldeanas aux longs cheveux nattés leur coulant sur l’épaule, têtes de señoritas, précieusement coiffées, qu’enveloppe avec légèreté la mantille de tulle. Mené par un gamin, un aveugle serrant sa main sale sur quelques billets, — les décimos de la loterie nationale, — adjure les voyageurs de lui en acheter un :

El gordo, señorito, el gordo [2].

Des cireurs de bottes s’activent à faire luire les souliers poussiéreux. Pieds nus, leurs bustes frêles serrés dans des fichus à fleurs, deux petites filles sérieuses regardent ceux qui s’en vont. A la dernière minute, c’est une ruée subite de retardataires. Dans la berlina où l’on tient six, nous sommes huit, brusquement ; et de solides garçons, habillés de velours brun, bondissant sur l’échelle que l’on allait décrocher, s’installent là-haut

  1. Comme il pleut doucement, — comme doucement il pleut, — comme il pleut doucement, — du côté de Laino, — du côté de Lestrobe !
  2. ... Monsieur, c’est celui-là qui va gagner le gros lot.