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Après la prévention du charbon, Pasteur s’occupa avec Thuillier du rouget des pores. Le bacille qui le cause fut isolé, cultivé et transformé en un vaccin dont l’usage se répandit rapidement,


Avant d’en avoir fini avec la maladie du charbon, Pasteur avait commencé l’étude de la rage, dans la pensée que, s’il triomphait d’une maladie aussi redoutée, ses doctrines gagneraient un grand prestige. Dans aucune autre recherche Pasteur et ses collaborateurs n’ont rencontré autant de difficultés. Pour expérimenter commodément sur une maladie virulente, il faut pouvoir la donner à volonté ; or, l’inoculation au chien de la bave d’un animal enragé ne communique pas la maladie à tout coup et, quand elle la donne, celle-ci n’apparaît parfois qu’après une incubation de plusieurs mois, d’où l’impossibilité de multiplier les expériences. De plus, les chiens, dont on dispose dans les laboratoires, sont des chiens errants pris à la fourrière et toujours suspects d’avoir été mordus, de sorte que l’on ne sait pas, quand la rage éclate, si elle provient de l’inoculation expérimentale ou d’une morsure antérieure. Il est donc nécessaire de garder longtemps les chiens en observation avant d’expérimenter sur eux, afin d’éliminer autant que possible cette cause d’erreur. Le premier progrès à réaliser dans l’étude de la rage était de trouver un procédé qui donne la maladie à coup sûr et dans un temps suffisamment court. On y arrive en partant d’une réflexion, déjà faite bien souvent sans qu’on en ait tiré parti, à savoir que la rage est une maladie nerveuse. Puisqu’il en est ainsi, le virus doit se trouver dans les centres nerveux ; l’expérience vérifia la justesse de cette conception. Parmi les chiens qui avaient reçu sous la peau du bulbe broyé d’un animal enragé, quelques-uns devinrent enragés après des incubations plus ou moins longues. Le virus rabique existe donc dans l’encéphale et la moelle épinière, il y est à l’état de pureté et la substance nerveuse d’un chien enragé est un matériel d’inoculation bien préférable à la bave, toujours riche en microbes divers. Posséder un virus rabique pur était déjà un progrès, il s’agissait maintenant de l’employer de façon à transmettre la rage à coup sûr et en peu de temps. Pour cela, il suffit de l’inoculer