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UN CENTENAIRE OUBLIÉ
JOACHIM DU BELLAY

Les lettres françaises viennent de fêter plusieurs centenaires et le monde les a aidées à célébrer celui de Molière. Joachim du Bellay ne réclamait point tant d’honneur. C’est entre Français, et presque entre écrivains, qu’il eût convenu de l’évoquer. Mais aucune commémoration n’a rappelé ce grand poète aux esprits qui lui gardent un culte fervent ; aucune cérémonie n’a eu lieu dans ce pays d’Anjou qu’il a aimé si tendrement et qu’il a fait entrer dans la littérature. Il ne faut pas que l’an s’achève sans que nos voix saluent l’auteur des Regrets et s’unissent un instant autour de son souvenir.

Joachim du Bellay est né en 1522, au château de la Turmelière, près du bourg de Liré dans le val de Loire, en face de la rive bretonne du fleuve. Il n’y a plus de discussion sur cette date, qu’attestent un de ses poèmes latins les plus précis et l’inscription funéraire composée au lendemain de sa mort et insérée dans son Tombeau. L’année a été définitivement fixée par son dernier biographe, M. Chamard, et les récentes éditions de ses œuvres, colle d’Ernest Courbet comme celle de la « Société des textes français modernes, » ne reviennent pas sur ce point.

Au temps de Sainte-Beuve, il est vrai, on croyait plutôt à 1525. Sur le monument d’Ancenis, qu’inaugurèrent en 1894 des discours de Hérédia et de Brunetière, une décision de Léon Séché a fait inscrire 1524. Mais une erreur, même sur la pierre, reste une erreur ; et il parait hasardé, pour une question de ce genre, d’en remontrer au poète lui-même et à ses amis. A défaut