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réunir au-dessus des partis tous ceux qui désirent sauver la nation en danger. » M. Mussolini ne cherche pas à abriter sa dictature derrière la légalité parlementaire ; il affirme que « la révolution a ses droits » et qu’il représente la révolution fasciste : mais son pouvoir, il n’en usera que pour le bien de l’État et de la nation italienne. A l’extérieur, il veut, « en face de la croissante intimité qui règne entre la Russie, la Turquie et l’Allemagne, » la consolidation de l’Entente, mais à la condition qu’elle soit vraiment « un bloc homogène, un équilibre égalitaire de forces avec les mêmes droits et les mêmes devoirs, » sans quoi, l’Italie reprendrait sa liberté d’action. L’Italie « demande à ses alliés un examen de conscience qu’ils n’ont pas fait depuis l’armistice. » A l’intérieur, M. Mussolini réprouve les incidents violents. Aussi sommes-nous convaincus qu’il va poursuivre avec sévérité les fascistes qui, le 19, à Vintimille, en présence du Consul de France, se sont livrés à de violentes manifestations au cri de « A bas la France ! » « L’État est fort, affirme-t-il, et montrera sa force contre tous, même contre les éventuelles illégalités des fascistes... Quiconque se dressera contre l’État sera puni... Au-dessus des minorités qui font de la politique militante, il y a quarante millions d’excellents Italiens qui travaillent et ont le droit de vivre tranquilles à l’abri des désordres chroniques, préludes de ruine générale. » Au besoin, M. Mussolini gouvernera sans la Chambre ; celle-ci « doit comprendre sa situation particulière qui peut faire qu’elle soit dissoute dans deux jours comme dans deux ans. » Il faut au Gouvernement de pleins pouvoirs, faute desquels « on ne pourrait faire aucune économie. » « Nous avons résolu de donner une discipline à la nation et nous la lui donnerons. Aucun de nos adversaires d’hier et d’aujourd’hui ne doit se faire d’illusions sur la durée de notre séjour au pouvoir. Notre Gouvernement a des bases formidables dans la conscience de la nation et il est soutenu par les meilleures et les plus jeunes générations italiennes... Que Dieu m’assiste pour conduire à une issue victorieuse ma tâche difficile ! » La Chambre a renoncé à discuter ; si elle garde le droit de voter, ce n’est qu’à la condition d’enregistrer sans broncher tout ce que lui demande M. Mussolini ; à peine quelques journaux osent-ils critiquer ses actes ; il a les pleins pouvoirs qu’il a demandés ; il est le maître de l’Italie. Il reste à savoir s’il pourra soutenir longtemps ce rôle difficile de réformateur et de redresseur de torts ; les grands gestes et les attitudes théâtrales n’y suffiront pas.

Le mardi 14 novembre, le Chancelier du Reich allemand, docteur