Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 12.djvu/718

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

liberté politique et fondé sa grandeur, renonce au système de la coalition qui fut un expédient de guerre, condamne la politique d’aventures et d’instabilité de M. Lloyd George et revient à l’équilibre historique de deux grands partis. L’Angleterre, en ces dernières années, surtout depuis que Joseph Chamberlain a désorganisé les partis en passant du radicalisme au conservatisme et en créant l’unionisme, a connu les crises politiques, mais la vieille armature a résisté ; dans le désarroi des opinions et des groupes, on la retrouve toujours solide ; c’est par elle que l’Angleterre est vraiment le seul pays du monde où le régime parlementaire fonctionne dans sa vérité. Les élections du 15 novembre, en mettant fin au gouvernement de coalition, lui donnent, sous une forme nouvelle, un regain de vitalité. Après les grandes secousses politiques intérieures et extérieures, les Anglais, par un instinct profond de leur race, se retirent dans leur île et s’y recueillent ; ils votent pour les conservateurs. La question, cette fois, était de savoir si le cabinet Bonar Law obtiendrait un succès assez marqué pour constituer, avec son seul parti, une majorité de gouvernement et pour rendre inutile toute coalition. Cette majorité, il l’obtient haut la main avec 341 sièges, soit environ 70 voix de plus que l’ensemble des autres partis.

Le vieux parti libéral, nuance Asquith, Grey, obtient 57 sièges ; il garde à peu près ses positions, mais il manque de cohésion intérieure ; le vicomte Grey, qui siège aux Lords, professe, à bien des points de vue, notamment dans les questions extérieures, des opinions qui le rapprochent des conservateurs, tandis que M. Asquith, plus doctrinaire, tendrait plutôt la main au Labour party. Le véritable vaincu de la journée du 15, c’est M. Lloyd George : le nouveau parti national-libéral qu’il a lente de créer et qui devait, dans sa pensée devenir l’arbitre des luttes politiques, n’obtient que 54 sièges, moins que la fraction Asquith ; c’est un parti mort-né qui ne tardera guère à se dissocier, les uns rejoignant l’aile gauche de l’armée conservatrice, d’autres se ralliant au vieux groupe libéral. Les conservateurs sont consolidés au pouvoir, mais le grand succès de la journée du 15 novembre appartient au Labour party ; il double le nombre de ses sièges qui de 75 passent à 144 ; il réunit 4 345 000 suffrages. Le jour de la rentrée du nouveau Parlement (20 novembre), c’est son leader M. Clyne â qui est venu s’asseoir le premier sur le banc de (‘opposition qui fait face au banc des ministres ; M. Asquith n’occupait que la seconde place, et M. Lloyd George brillait par son absence. Le lendemain, M. Ramsay Mac-Donald, socialiste et pacifiste, soutenu