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fixée en toute indépendance, tantôt instructeurs et professeurs dans les écoles, tantôt organisateurs dans les états-majors et les ministères. Ils continuent l’œuvre de leurs frères d’armes ; deux mille officiers français, cinq cents en Amérique, quinze cents en France, étaient à la disposition de l’état-major américain pendant la dernière année de la guerre. Dans telle division, sur dix officiers français détachés, sept sont tombés sur le champ de bataille côte à côte avec leurs camarades américains… Voilà de la bonne propagande. Ici la mission française a retrouvé les traces des missions précédentes qui ont travaillé pendant quinze ans ; le général Vassal, qui la commande, a dignement succédé au général Clément, aujourd’hui au cadre de réserve, mais que le Gouvernement péruvien a invité aux fêtes du centenaire. Le général Clément a gardé une grande situation à Lima, où la reconnaissance de tousse témoigne par des attentions touchantes.

Le général Vassal possède la confiance complète du ministre de la Guerre, M. Luna Iglesias ; cet ardent patriote, d’un caractère ferme et droit et d’une intelligence très claire, voit que son pays a besoin d’une armée sérieuse, qui lui donne confiance ; il pense donc que si les manifestations comme celle d’aujourd’hui sont très utiles, elles réclament d’être complétées par un travail constant des officiers et de la troupe. Il veille à un emploi efficace des maigres crédits que le budget met à sa disposition.

La belle cérémonie en l’honneur d’un guerrier se termine donc par le déploiement d’une pompe toute militaire : les Liméens aiment vraiment leur armée et ils en sont fiers.

Le lendemain, nous assistons à un Te Deum chanté dans la cathédrale de Lima. Cette fois, c’est la pompe religieuse et civile qui donne tout son éclat à la cérémonie, alors que les troupes fournissent seulement le cadre. Nous nous rendons ensuite processionnellement de la cathédrale à l’hôtel du Président, qui est l’ancien palais des vice-rois espagnols ; on y montre les appartements de Francisco Pizarre, le premier conquérant du Pérou ; un arbre vit encore sous lequel il aimait à se reposer ; tout près de là est la dalle où le vieux conquistador tomba assassiné par ses compagnons d’armes, et ses restes reposent dans la cathédrale, après avoir longtemps erré…

L’admiration hésite devant cette terrible figure, magnifique de courage et d’audace, mais couverte de sang traîtreusement versé : les assassins de Pizarre ne songeaient point à venger les