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britannique à celle de la France, soutenant nos intérêts là où ils sont prépondérants, invoquant notre appui là où dominent ceux de la Grande-Bretagne, l’Allemagne ne serait pas aujourd’hui au bord de l’abîme, l’Orient ne serait pas troublé et menacé d’un nouveau conflit. Il n’est jamais trop tard pour revenir à la politique du bon sens et de la vérité ; la presse anglaise et la nôtre le proclament à l’unisson et ce sera le programme du nouveau Cabinet britannique. M. Bonar Law est un loyal gentleman écossais ; si son extérieur est froid et réservé, son cœur est chaud et sa parole sage ; il a donné maintes preuves de ses sympathies pour cette France sur le sol de laquelle ses deux fils sont tombés face à l’ennemi ; nous ne lui demanderons pas de sacrifier les intérêts essentiels du grand pays dont il assume la direction, mais nous sommes assurés qu’il comprend l’étroite solidarité d’intérêts qui, aujourd’hui comme hier, unit les vainqueurs de la Grande Guerre.

Tandis qu’une crise politique aiguë éclatait en Angleterre et que M. Lloyd George quittait le pouvoir, et, rentré dans la lutte, faisait blanc de son épée, le Parlement français ouvrait dans le calme sa session extraordinaire. A la Chambre, la longue liste des interpellations variées s’écoule peu à peu sans passionner l’opinion ; quelques-unes, celle par exemple de M. Paul Reynaud sur les réparations, sont écoutées avec profit. Les événements d’Orient ont montré que le redressement si nécessaire de la politique française est réalisé et la constitution en Angleterre d’un nouveau ministère présage que son isolement va cesser. A la Commission des Réparations, un débat très vif a été provoqué à l’improviste, le 11 octobre, par Sir John Bradbury avant la chute du Cabinet Lloyd George ; il s’est continué le 21 par un contre-projet de M. Barthou ; nous aurons à revenir sur cette discussion ; elle prépare le grand et décisif débat qui doit s’ouvrir à Bruxelles avant la fin de l’année sur la question des réparations liée à celle des dettes interalliées. M. Poincaré, M. Bonar Law et M. Giolitti, si, comme on l’assure, il est sur le point de remplacer M. Facta, vont se trouver en présence de la faillite allemande : l’heure des résolutions va bientôt sonner ; elle ne surprendra pas M. Poincaré.


RENÉ PINON.


Le Directeur-Gérant :

RENÉ DOUMIC.