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qui avaient jusqu’ici soutenu le cabinet de coalition ont estimé que la politique personnelle de M. Lloyd George compromettait gravement les intérêts de l’Empire britannique à l’extérieur : pour sauver l’Allemagne, il a suscité le juste mécontentement de la France, et l’Allemagne est à la veille d’une catastrophe économique et politique ; pour sauver la Grèce, il a exposé l’Angleterre à une guerre avec la Turquie au risque de provoquer la dislocation de l’Empire britannique, et la Grèce est finie comme Puissance asiatique. Son succès à la conférence de Washington n’a été remporté qu’aux dépens de la France, et les États-Unis sont toujours aussi éloignés, — M. Hoover vient encore de l’affirmer, — de se prêter à une liquidation des dettes interalliées. À Gênes et à La Haye, il a échoué dans sa tentative prématurée et mal conduite pour faire rentrer la Russie des Soviets dans la vie politique et économique de l’Europe. Même sa politique libérale en Irlande et en Egypte, que sans doute l’histoire retiendra à son honneur, lui est imputée à grief par une grande partie des conservateurs. À l’intérieur, la formule des inquiétudes unionistes a été donnée par M. Stanley Baldwin : « M. Lloyd George, qui a brisé le parti libéral, pourrait maintenant briser le parti conservateur. » Fallait-il donc persévérer dans cette politique de la coalition qui avait conduit et gagné la guerre avec M. Lloyd George ou bien revenir aux anciens partis et aux anciens programmes ?

Déjà la question s’était posée en mars et M. Lloyd George avait réussi à recoller sa majorité disjointe ; après six ans de pouvoir, il se croyait l’homme indispensable. La crise orientale et l’approche des élections générales ont réveillé les consciences et ravivé les inquiétudes des conservateurs. M. Chamberlain, leader du parti aux Communes, avait convoqué pour le 19 une réunion des députés unionistes ; il s’était abstenu d’y convier les pairs ; ceux d’entre eux qui y furent convoqués en qualité de membres du Cabinet, comme lord Curzon, s’abstinrent d’y paraître. Une élection partielle à Newport où le candidat conservateur l’emporta, contre l’attente générale, sur ses concurrents libéral et travailliste, encouragea la résistance du parti aux directions de M. Chamberlain qui, le 13, dans son discours de Birmingham, avait préconisé chaleureusement le maintien de la coalition. Le 19, la rue, la première, parla ; une foule très animée hua M. Chamberlain, lord Birkenhead, et sir Laming Worthington Evans. Dans la salle M. Chamberlain, président, prêcha l’union des conservateurs, le maintien de la coalition avec les libéraux, et agita le péril travailliste. Une motion proposée par M. Pretyman déclarait que « le parti