Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 12.djvu/207

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
A LA RECHERCHE DE LA PATRIE
AVEC L’ARMÉE VOLONTAIRE
(1917-1918)

IlI [1]


X. — LA MESSE DE PAQUES

Cette année-là Pâques tombait tard, le 21 avril du style russe. Nous ignorions où il nous serait donné de fêter ce jour, mais, instinctivement, l’approche de ces Pâques nous emplissait d’espoir. En Russie, cette fête printanière est toujours celle de l’espérance et du renouveau.

Nous avancions dans la direction du Don.

A Lejanka, où, pour la première fois, nous avions pris contact avec les bolchévistes au début de la campagne, nous fûmes reçus dans la maison du prêtre. C’était la semaine de la Passion ; on faisait cuire les pains pour la fête, on teignait les œufs en couleur. Nous comptions bien passer Pâques dans cette demeure hospitalière. Les bolchévistes semblaient avoir renoncé à nous poursuivre ; nous jouissions d’un temps de répit ; nous allions à l’église entendre les messes, avec les sœurs Engelgardt ; entre temps, nous rêvions de notre nouveau paradis, Novotcherkassk, qui nous semblait aussi beau qu’Ekaterinodar perdu.

Ainsi nous atteignîmes le samedi de la semaine de la Passion : comment douter que nous dussions fêter Pâques ici même ? Les bolchévistes en décidèrent autrement. Dès le matin, ils ouvrirent le feu sur Lejanka. Les obus arrivaient en assez

  1. Voyez la Revue des 1er septembre et 15 octobre.