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guerre, une réédition de 1776, une rupture avec la métropole ?

Le péril est urgent ; une sédition assez vive a éclaté à Montréal ; des bandes d’Américains et de rebelles paraissent dans Ontario. Le Parlement britannique s’inquiète, car jusqu’ici encore jamais le Canada n’a été troublé de telle manière. Bientôt cependant des hommes d’Etat, dignes de ce nom, définissent et imposent le régime de l’Union, entre Haut et Bas-Canada ; l’honneur en revient à la prudence du président des Etats-Unis Van Buren, de quelques parlementaires de Londres, qui refusent de s’associer aux jalousies des Anglais du Canada contre leurs voisins français et surtout des chefs de ces Français eux-mêmes, qui acceptèrent l’Union par une sorte d’acte de foi en leur race. Certes l’expérience était audacieuse, de supprimer les institutions parlementaires propres à la population canadienne française et d admettre la confusion de l’électorat français et du britannique en une seule représentation. Qu’il y ait eu chez nombre d’Anglais des deux bords de l’Océan l’arrière-pensée d’absorber ainsi une race de « dissidents, » nul ne le contestera. Pourtant, à regarder d’un peu haut (et des contemporains amis de François-Xavier Garneau en étaient fort capables), il est visible que l’Union offrait le meilleur moyen de sauvegardera la fois la nationalité canadienne française et la souveraineté britannique au Canada.


Le Dominion de 1867 n’est, en effet, qu’une extension de l’Union de 1840 ; nous devons en parler ici brièvement, car cette conclusion est nécessaire, bien que l’Histoire de Garneau s’arrête à 1840. La Confédération de 1867 n’était pas, dans l’intention de quelques-uns, plus favorable que l’Union aux Canadiens français. Elle n’eut pourtant pas d’avocat plus persévérant et plus habile que l’un de ceux-ci, E. P. Taché, entièrement d’accord avec les protagonistes anglais de la politique nationale canadienne, sir Charles Tupper et sir John Macdonald. Le Dominion, concerté à Londres entre les intéressés et le secrétaire d’Etat des Colonies, réunit d’abord les anciennes provinces du Saint-Laurent, Québec et Ontario, avec les provinces maritimes, Nouvelle Ecosse et Nouveau Brunswick : il achète en 1870 le domaine du la Compagnie de la Baie d’Hudson, toute la Prairie, jusqu’aux Montagnes Rocheuses, où des Territoires, puis des Provinces à Parlement se constitueront ensuite