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La foule s’y presse, compacte, enthousiaste. Notre chargé d’affaires, M. de Simonin, vient nous apporter les derniers renseignements sur les réceptions officielles. Je dois aller d’abord rendre visite au Président de la République de Panama, M. de Porras ; en traversant la ville, je passe devant les enfants des écoles qui font la haie, au nombre de six mille, tenant à la main de petits drapeaux français. Les acclamations augmentent d’intensité, à mesure que je gagne le centre de la capitale. Après la cordiale réception du Président et de sa famille, je suis invité à prendre place sur le balcon de son hôtel d’où j’assiste au défilé des enfants : de longs vivats s’élèvent de la foule ; comme le fils du Président, jeune, déluré, d’une dizaine d’années, se trouve près de moi, je place très naturellement mon bras sur son épaule : les acclamations redoublent. Nous en sommes au point où les gestes les plus simples font sensation.

Je rends visite au Gouverneur de la zone américaine que je remercie de toutes ses attentions, dont je sais tout le prix ; à mon hôte, le général Babbitt ; et je me rends sur la place de France où je dois poser la première pierre d’un monumentaux Français morts pendant les travaux du canal. Dans un éloquent discours, le Président rend hommage à nos compatriotes et remercie la France d’avoir conçu et commencé la grande œuvre qui a uni les deux Océans. Seul, dit-il, un Français pouvait avoir une telle hardiesse, et c’est seulement en France qu’il pouvait rencontrer les moyens d’exécuter « cette nouvelle merveille du monde. » Ici, dit-il en substance, les Français qui arrachèrent la première pelletée de terre au cœur de l’Isthme n’ont pas eu la joie d’achever leur entreprise, mais ils ont jalonné de leurs ossements la route à suivre.

J’ai repris la même idée en y associant ceux qui ont achevé la grande entreprise : le Gouvernement panaméen a accueilli la collaboration des Etats-Unis, qui ont su conduire l’œuvre à son aboutissement. Les trois Républiques se trouvent ainsi associées dans cette tâche pacifique et grandiose comme elles ont été unies pendant la guerre mondiale.

Le soir, un banquet offert par le président de Porras nous réunissait à l’Union Club aux autorités américaines, aux membres du Gouvernement panaméen et aux notabilités. A