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dans les environs de Berlin, sous les yeux de l’Empereur. J’étais un de ceux qui tenaient les drapeaux pris à l’ennemi à la bataille d’Iéna, quand l’Empereur les présenta à la députation du Sénat qui vint jusqu’à Berlin pour les recevoir. C’était un cadeau que l’Empereur faisait à son Sénat conservateur.

Pendant les vingt-sept jours pleins que je restai à Berlin, je visitai tous les monuments, toutes les collections importantes, tous les beaux quartiers de cette belle ville. Je fus plusieurs fois au spectacle pour voir jouer des grands opéras français, traduits et arrangés pour la scène allemande.

Le lendemain de son entrée à Berlin, l’Empereur fit mettre à l’ordre de l’armée une nouvelle proclamation pour annoncer que les Russes marchaient à notre rencontre, et qu’ils seraient battus comme à Austerlitz. Elle se terminait par cette phrase : « Soldats, je ne puis mieux exprimer les sentiments que j’éprouve pour vous, qu’en disant que je porte dans mon cœur l’amour que vous me montrez tous les jours. »


À LA RENCONTRE DES RUSSES

Entré en Pologne le 29 novembre, Barrès arrive le 3 décembre à Posen où il restera jusqu’au 15.

A notre arrivée, on nous lut la nouvelle proclamation que l’Empereur fit mettre 0 l’ordre de l’armée le 2 décembre pour annoncer l’anniversaire de la bataille d’Austerlitz, la prise de Varsovie que les Russes n’avaient pas pu défendre, et l’arrivée de la Grande Armée sur les bords de la Vistule.

Cette belle proclamation était suivie d’un décret qui érigeait l’emplacement de la Madeleine à Paris, en un temple de la gloire sur le frontispice duquel on devait placer cette inscription en lettres d’or : l’Empereur Napoléon aux soldats de la Grande Armée. Ce décret prouvait à l’armée combien l’Empereur avait soin de sa gloire et l’encourageait à de nouveaux triomphes...

Passage de la Vistule et du Bug. Séjour à Varsovie où la rigueur du froid n’empêche pas l’Empereur de passer des revues et faire défiler la parade.

Depuis notre entrée en campagne en Pologne, on nous avait permis de porter le chapeau, la corne en avant, et d’ajouter de chaque côté un morceau de fourrure qu’on attachait sous le