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11 mars.

Aujourd’hui, le Maréchal a visité, à la limite de la Concession, le grand établissement de jésuites français de Zikawei : il tenait à donner cette marque de sympathie à ceux qui ont tant contribué au développement de notre influence en Chine.

Il a parcouru le collège Saint-Ignace où les 400 jeunes élèves chinois lui ont rendu les honneurs militaires ; il a visité les 500 orphelins qu’entretiennent les Pères ; surtout, il s’est intéressé au célèbre observatoire météorologique que dirige depuis 1895 le R. P. Froc, celui qu’on a surnommé le « père des typhons. » Il faut avoir navigué dans les mers de Chine pour savoir la place que cet établissement tient dans les préoccupations des marins et la confiance qu’ils ont en lui. « Pendant la mauvaise saison, disait M. Brieux en 1913, nul navire de guerre ou de commerce, à quelque nation qu’il appartienne, ne quitte un port d’Extrême-Orient avant d’avoir demandé télégraphiquement à l’observatoire de Zikawei s’il peut partir sans danger. » Actuellement le réseau d’information s’étend jusqu’aux Philippines et aux Mariannes ; 16 stations ou sémaphores transmettent aux marins les avis journaliers émis par le Père Froc. Celui-ci, du haut de son observatoire, veille sans cesse sur ses amis du large. Sous sa robe de jésuite, le Père Froc est un marin français qui a bien mérité de la marine de tous les pays.

Le soir, toute la Concession flamboie ; l’Hôtel de Ville, le Consulat, les écoles, les maisons particulières, des pylônes, des arcs de triomphe, tout est illuminé : une foule énorme de Chinois curieux, encombre les rues macadamisées. Lentement, l’automobile du Maréchal parvient au Cercle Sportif où 400 anciens combattants alliés ont tenu à le recevoir. C’est un joyeux repas, égayé par la Madelon et Tipperary.

Et voici qu’à la fin, un officier français se lève : « Merci, monsieur le Maréchal, pour nos deux provinces que vous avez contribué à nous rendre et pour la gloire que vous nous avez donnée. » Puis un colonel anglais : « Je vous vois pour la deuxième fois ; la première fois, j’étais encore plus ému qu’aujourd’hui ; c’était à Neuve-Chapelle, et vous m’avez remis la Légion d’honneur. Merci pour cette fois où je n’ai pas osé ouvrir la bouche et merci pour aujourd’hui où votre gloire vient nous visiter. » — Un Américain : « Merci, parce que vous nous avez montré en 1917 ce que nous devions faire, et le faisant, nous