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des pièces d’argent en quantité limitée. Ce n’est là qu’un détail ; nous le mentionnons pour mémoire. Le point à retenir est celui-ci : à la base de la conception monétaire moderne, se trouve un certain poids d’or.

La monnaie a donc un mérite intrinsèque. En mettant au creuset les pièces de vingt francs revêtues de l’effigie de la Semeuse de Roty, nous ne diminuons pas la valeur qu’elles représentent, nous obtenons un lingot qui a la même vertu que les disques dont la fusion l’a créé et en lesquels il peut être retransformé à nouveau. Il a cette vertu à l’intérieur et au-delà des frontières ; la législation qui en fait l’élément constitutif par excellence de la monnaie, est à peu près universelle aujourd’hui.

Que dès lors les individus et les peuples cherchent à se procurer la plus grande quantité possible de cette monnaie d’or, cela est naturel. Elle est une véritable richesse. Nous nous abstiendrons de pénétrer plus avant dans l’analyse de la nature de la richesse constituée par les métaux précieux ; nous pourrions faire observer qu’elle en est une au second degré ; elle n’est pas consommable en elle-même et par elle-même, comme le sont des denrées ou des objets de première nécessité, qu’elle sert à acquérir ; mais elle a sa valeur propre, attestée par le fait qu’elle peut se vendre à un prix égal à son cours monétaire. Bien plus, il est aujourd’hui certains marchés sur lesquels elle se vend plus cher que ce cours. A Londres l’once d’or fin, qui se transforme en monnaie à raison de 85 shillings, est cotée en ce moment à 110 shillings, ce qui revient à dire que les billets au moyen desquels on paie les lingots de métal jaune perdent près de 30 pour 100 par rapport à ce métal.

Considérons maintenant la monnaie de papier, qu’elle émane directement de l’Etat ou d’une banque, autorisée par celui-ci à émettre des billets. Ces derniers n’ont pas été autre chose, à l’origine, qu’une promesse signée par l’émetteur de les rembourser à vue en espèces : c’est encore la mention qui est inscrite aujourd’hui sur les 40 milliards de francs de billets de la Banque de France qui sont en circulation, « payables en espèces à vue au porteur. » Aussi longtemps que cette promesse est remplie, il n’y a pas de différence théorique et il ne s’établit pas en fait d’écart entre l’or et le papier, celui-ci étant échangeable à tout moment, à la volonté du porteur, contre le métal