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politique, la division confessionnelle, une population juive considérable, un trop grand nombre de prolétaires et enfin un libéralisme bourgeois qui a trop regardé du côté de l’Occident. Ce sont là, au dire de M. Georg von Below, autant de ferments de décomposition nationale, qui corrompent les deux tiers environ de la population totale de l’Allemagne. Conclusion : il faut rendre au peuple allemand un esprit national et revenir franchement à l’idéal bismarckien. Et M. Vermeil remarque : « Je crains fort que cette conclusion de M. G. von Below ne soit celle de toute la bourgeoisie allemande d’aujourd’hui, et que cette bourgeoisie ne finisse prochainement par entraîner la social-démocratie tout entière dans le fatal sillage d’une politique orientée, comme celle de Bismarck, vers la guerre. »

Ajoutez à toutes ces causes de troubles et de bouleversements les difficultés auxquelles donne lieu l’application de l’article 18 de la Constitution de Weimar, la tension des rapports du Reich avec les États, les velléités fédéralistes d’une partie du Hanovre, le conflit de la Bavière avec Berlin, la violence des attaques communistes entre les socialistes de droite et le gouvernement d’Empire, l’incohérence du parlementarisme allemand, l’inexpérience de tous les partis dans la pratique de la liberté ; et vous vous rendrez compte de l’extrême fragilité de l’édifice politique que l’Allemagne a fiévreusement élevé à l’heure de la défaite et sur le frontispice duquel elle a inscrit, sans grande conviction, le mot de République. Quoi qu’il advienne demain de cette organisation instable, nous n’avons rien à redouter, tant que l’Allemagne n’a pas réarmé et tant que nous sommes sur le Rhin : c’est Ce que Ludendorff lui-même reconnaissait naguère dans une conversation avec M. Sauerwein. Le Reich fût-il entraîné, par une réaction militariste et impériale, dans de nouvelles aventures, nous serions en mesure de le rappeler sans effort au sentiment de la réalité. Mais cette supériorité est passagère, et nous la diminuons d’ailleurs, à chaque retranchement volontaire que nous faisons de nos droits et à chaque concession que nous nous laissons arracher par l’Allemagne. C’est donc dès aujourd’hui que, sans aigreur et sans haine, nous devons nous cantonner, vis-à-vis du Reich, dans une politique de vigilance et de fermeté.

Il serait souhaitable que la prochaine conférence de Washington, si importante qu’elle soit, ne nous amenât point à détourner les yeux des redoutables problèmes qui restent posés à nos frontières et, du reste, dans toute l’Europe centrale et orientale. M. Briand a fait annoncer qu’il se rendrait, en personne, à l’invitation du