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Frères en Jésus-Christ. » Pendant plus de dix ans, le pauvre séminaire, qui, dans ses beaux jours, comptait à peine une douzaine de séminaristes, dut lutter contre l’hostilité qui lui barrait le chemin de la naturalisation.

Mais ces dix années ne furent point perdues pour la Compagnie. Guillaume du Prat l’invita bientôt à venir en Auvergne fonder, non pas un séminaire, mais un collège d’enseignement. Il voulait relever dans sa ville de Billom l’ancienne Université déchue, et il avait acheté des bâtiments qu’il mettait à sa disposition. Ignace de Loyola n’avait pas encore pensé à réformer l’éducation de la jeunesse. Ce fut seulement alors que, remaniant les Constitutions de son Ordre « selon les leçons de l’expérience, » il y inscrivit ce mode d’apostolat. En 1553, les Jésuites ouvrent le collège de Billom ; en 1559, celui de Pamiers ; en 1561, celui de Rodez ; mais ces deux derniers, à peine lancés, s’abîmèrent dans la houle furieuse des guerres de religion. Cependant, en 1561, entre deux séances du Colloque de Poissy, l’Assemblée eut à statuer sur l’admission légale de la Société de Jésus et la lui accorda. Ni Loyola, mort cette même année, ni Guillaume du Prat, qui l’avait précédé dans la tombe, ne virent ce qui allait en résulter : la transformation de la maison d’études de Paris en maison d’enseignement.

Le Collège de Clermont était fondé, ce Collège qui devait porter successivement les noms de Collège Louis-le-Grand, — Collège de l’Égalité, — Institut des Boursiers, — Prytanée français, — Collège de Paris, — Lycée de Paris, — Lycée Impérial, — Lycée de Louis-le-Grand, — Collège royal de Louis-le-Grand, — Lycée National, — Lycée Descartes, — Lycée impérial Louis-le-Grand, — Lycée Descartes, — Lycée Louis-le-Grand. Je ne crois pas que nous ayons fait mieux dans ce genre. Avons-nous assez suborné ces vieilles pierres ! Nous pouvons égrener sur le chapelet de leurs dénominations les fastes des trois cents dernières années de notre histoire, des cent trente dernières années surtout, puisqu’en moins d’un siècle elles ont pris treize noms différents. Mais ne nous plaignons pas : pour une fois le bon sens a triomphé. Le premier nom de Collège de Clermont, qui a duré si longtemps, n’était point dû, comme il serait légitime qu’on le pensât, à la reconnaissance dont les Jésuites entouraient le souvenir de Guillaume du Prat. Il leur avait été imposé par la mauvaise humeur du Parlement qui