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sur table et, dans une note du 30 décembre, faisaient clairement connaître leurs revendications. L’Allemagne et l’Autriche répliquaient en termes hypocrites et évasifs ; et le 22 janvier 1917, dans un message adressé au Congrès américain, le Président Wilson, après avoir signalé le contraste que présentaient l’attitude de l’Entente et celle de ses ennemis, ajoutait qu’il ne pouvait y avoir de paix durable entre les nations européennes, sans que les États-Unis fissent entendre leur voix. Il énonçait les principes américains, qui devaient, d’après lui, prévaloir dans le règlement du conflit, et c’est alors qu’il prononçait la trop fameuse parole de paix sans victoire.

Mais le 31 janvier 1917, l’Allemagne notifiait aux Puissances un nouveau blocus sous-marin, beaucoup plus étendu que celui qu’elle avait précédemment établi. Cette notification mit naturellement le comble au légitime mécontentement des États-Unis, qui exécutèrent aussitôt leur menace. Ils rappelèrent leur ambassadeur de Berlin et remirent à l’ambassadeur d’Allemagne ses passeports. Mais ils patientèrent encore, et la guerre ne fut pas déclarée. Le 2.3 février suivant, nouveau message de M. Wilson. Il rappelle que deux navires américains ont encore été coulés, que presque tous les bâtimens sont forcés de rester à leurs ports d’attache à cause des dangers du blocus et que tout le commerce américain souffre de cette crise prolongée. Il proclame que cette situation ne peut durer ; il ne propose cependant encore que la neutralité armée, dont il y a, dit-il, de nombreux précédents dans l’histoire des États-Unis. Le 4 mars, à l’occasion de sa nouvelle investiture, le Président, debout sur les degrés du Capitole, prononce son discours inaugural et il répète que les États-Unis resteront fermes dans la neutralité armée. « Nous ne sommes plus, dit-il, des provinciaux. Les événements tragiques de trente mois de guerre ont fait de nous des citoyens du monde. Est-ce à dire que nous serons moins Américains à l’avenir ? Non pas. Nous serons, si possible, plus Américains encore… » Mais la guerre sous-marine se poursuit de plus en plus impitoyable ; et le gouvernement allemand ne tolère pas la neutralité armée ; il refuse expressément aux neutres, dans les zones maritimes qu’il a déterminées, le droit de se servir de leurs armes pour la défense de leurs nationaux et de leurs marchandises. Les États-Unis sont décidément atteints dans leurs œuvres vives. La coupe est pleine. Le Président, convoque le Congrès en session extraordinaire et le 2 avril, dans un message solennel, il lui demande d’accepter enfin l’état de guerre qui lui est imposé par l’Allemagne. Mais, à ce moment même, il se met si peu