Page:Revue des Deux Mondes - 1921 - tome 65.djvu/445

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pyrénées. Cette expérimentation sans précédent est l’œuvre de « l’Association Centrale pour l’Aménagement des montagnes. » Ses opérations et ses enseignements ont si pleinement réussi que l’Administration des eaux et forêts vient d’inviter par une circulaire du 3 avril 1920 tous les conservateurs des régions montagneuses a commencer dès cette année des améliorations pastorales du même genre, puis qu’une autre circulaire du 9 juin 1920 élargit les attributions du personnel forestier en lui donnant la mission de faire pénétrer dans le public et dans les écoles les notions trop peu connues de la sylviculture.

Tout en tenant compte de ces circonstances favorables, il faut un gros effort pour reboiser en vingt ans 400 000 hectares, pour ramener en dix ans la végétation sur les 3 221 360 hectares, dont Demontzy signalait en 1889 la dégradation et sur toutes les vastes étendues que la dévastation pastorale a dénudées depuis. C’est un effort qui pourrait sembler impossible, si le président Roosevelt n’en avait fait un plus gigantesque encore aux États-Unis, où huit ans de présidence lui ont suffi pour transformer la mentalité forestière. Grâce à son énergique action, intelligemment secondé par le forester Gifford Pinchot, ancien élève de l’Ecole de Nancy, et par l’Arbor-Day, il a augmenté les forêts domaniales de 70 millions d’hectares, porté de treize agents à plus de deux mille le personnel chargé de leur administration, et la génération actuelle apporte au reboisement des États-Unis la même énergie qu’avaient mise les précédentes à conquérir sur la forêt vierge l’emplacement de leurs cultures.

Il y faudra certainement affecter des sommes considérables, qui, loin de constituer une dépense réelle, représenteront une simple avance remboursée par les produits du sol en moins d’un siècle, avance dont l’ajournement reproduirait dans quinze ans l’angoissante situation de 1914 et toutes ses lamentables conséquences : crise du charbon et des transports, impossibilité de fabriquer les munitions assez rapidement, exagération des achats à l’étranger, dépréciation du change, et nouveau renchérissement de la vie.

La mauvaise volonté mise par l’Allemagne à remplir les conditions du traité doit ouvrir les yeux de nos alliés sur l’absolue nécessité de mettre la France, citadelle avancée et champ de bataille de la civilisation, en état de supporter dans