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Il est encore suffisant, malgré la saignée de la guerre, en modifiant seulement le nombre de francs d’après le changement de leur puissance libératoire, s’il s’applique à temps pour prévenir la disparition des massifs coupés à blanc. Sa réalisation dans un délai de vingt ans permettrait à la France de produire avant trois quarts de siècle tous les bois d’œuvre nécessaires à sa consommation, car les bois expédiés aux mines anglaises compensent approximativement les variétés étrangères dont l’importation pouvait être supprimée. L’achèvement en vingt ans de ce programme est d’ailleurs parfaitement réalisable, car il ne représente même pas 2 500 hectares reboisés par an et par département, tandis que le reboisement des landes de Gascogne a dépassé dans chacun des départements participants l’allure de plus de 10 000 hectares par an.

S’il est encourageant de savoir qu’un énergique effort suffit a la France pour mettre au pair sa production ligneuse en soixante-dix ans (temps nécessaire pour que les dernières plantations à faire dans vingt ans aient leur cinquantième feuille), il l’est plus encore d’être assuré qu’elle peut en quinze ans augmenter presque de moitié le rendement de toutes ses forces hydro-électriques installées ou en voie d’installation, et cette assurance ressort d’une communication faite le 8 décembre 1919 à l’Académie des Sciences. La Note sur le concours de l’arbre pour soutirer de l’eau à l’atmosphère indique en effet que l’apport des eaux atmosphériques au sol dénudé serait augmenté de 100 pour cent par le boisement normal, ou de 40 pour cent par l’embroussaillement d’une moitié de sa surface, et il suffit d’évincer pendant cinq ans les chèvres et les moutons étrangers, avec une dépense totale de cinq francs par hectare, pour faire reparaître des bois insoupçonnés comme pour embroussailler jusqu’aux rochers, sans privation ni gêne pour les habitants et leurs troupeaux. Si donc cet embroussaillement est achevé dans dix ans, toutes les forces hydrauliques de la France seront renforcées de 40 pour 100 quand arrivera la quinzième année, fixée par le traité de Versailles pour évacuer la rive gauche du Rhin.

Le délai de dix ans, pour l’embroussaillement imposé par le principe si vis pacem para bellum et par la date à laquelle la France doit être prête à repousser une nouvelle agression, pourrait paraître bien court si des expériences concluantes n’étaient déjà faites sur plusieurs milliers d’hectares dans les Alpes et les