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REVUE LITTÉRAIRE

SOUS LES DEHORS DE L’IRONIE[1].


Pour la fête de La Fontaine, M. Franc-Nohain publie un livre de Fables charmantes. C’est une gracieuse idée. Il a composé ses fables un peu à la manière de La Fontaine, mais surtout à sa manière. Il n’a point fait un pastiche ; il a procédé plutôt comme autrefois Jules Lemaître qui, en marge des vieux livres, écrivait de nouveaux contes et s’amusait à montrer qu’en littérature, ailleurs aussi, l’invention naît bien joliment de la continuité. Ce sont des étourdis, et ignorants, qui se figurent qu’ils vont tout improviser, l’air et la chanson. Le plus souvent, ils ressassent, et ne le savent pas, ou bien font semblant de ne pas le savoir. Ils ont un goût si furieux de ce qu’ils croient qui est ou qui serait leur liberté, qu’ils méconnaissent hardiment le passé. Ils ne le suppriment pas ; ils ne suppriment seulement pas l’influence que le passé a sur eux. Cette influence les sauverait, s’ils ne l’accueillaient pas si mal. Elle ne les gênerait pas et les seconderait, s’ils l’utilisaient bien. Nos maîtres ne sont pas du tout les ennemis d’une originalité la plus imprévue. Voilà ce dont témoignent à merveille, et opportunément, les Fables de M. Franc-Nohain, dociles et très singulières.

Docile, M. Franc-Nohain ? Docile avec discernement. Et il faut croire que, tout bien considéré, l’occasion ne s’est pas présentée à

  1. Fables, par M. Franc-Nohain (Renaissance du livre). — Du même auteur, les Chansons des trains et des gares, la Nouvelle cuisinière bourgeoise, le Pays de l’Instar (Éditions de la Revue Blanche) ; le Dimanche en famille (librairie Juven), l’Heure espagnole, Jaboune, le Gardien des muses (Fasquelle) ; Fiches (Lethielleux), Serinettes et petites oies blanches, les Avis de l’oncle Bertrand (Renaissance du livre).