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Le palais de l’Empereur était situé sur la partie la plus élevée de la ville ; une façade la regardait, et l’autre les côtes du détroit de Piombino. De ce côté-ci, devant la maison, était un jardin carré-long, bordé d’un parapet construit sur des rochers ; un trottoir ou terrasse régnait devant, dans toute la longueur ; et, en dehors du parapet, était une pente rapide et accidentée qui descendait jusqu’à la mer. L’Empereur se promenait le matin et le soir sur cette terrasse ; là, il voyait arriver les bâtiments venant du continent.

La maison n’avait qu’un rez-de-chaussée ; mais aux extrémités du bâtiment existait un petit étage formant deux pavillons. Pour les relier entre eux, l’Empereur fit construire une grande pièce, pour compléter un appartement qu’il destinait à la princesse Pauline, qui devait venir à Porto-Ferrajo et y résider. Il fit décorer cette pièce de manière à en faire un vaste et beau salon ; aussi devint-il la plus belle pièce de l’habitation. L’Empereur occupait tout le rez-de-chaussée qui se composait, tant sur le jardin que sur la place, de huit ou neuf pièces, dont un salon et une chambre à coucher étaient les plus spacieuses. Le long de la maison, du côté du jardin, régnait un large promenoir garanti des rayons du soleil par une tente de même longueur. Le matin, quand le temps était beau, cette tente était déroulée pour que l’Empereur pût se promener à l’ombre et elle avait en même temps l’avantage de préserver durant la matinée, d’une trop grande chaleur, les chambres de Sa Majesté. Dans la partie Est du jardin, sur deux pilastres qui servaient d’entrée à un petit parterre, il y avait deux vases d’albâtre d’une assez grande dimension dans lesquels, la nuit venue, on mettait des lampes ; cette lumière douce plaisait à l’Empereur.

Avant l’arrivée de la princesse Pauline, plusieurs caisses de meubles, de porcelaines, de cristaux et d’une infinité de jolies inutilités avaient été dé-barquées au port et transportées au palais. L’Empereur, curieux de savoir ce que contenaient ces caisses et voulant voir le premier, les faisait ouvrir devant lui. Quand la caisse contenait des porcelaines, des cristaux ou des bronzes, il faisait prendre les objets un à un, se les faisait donner, s’amusait à les débarrasser de leurs enveloppes et, après les avoir regardés et examinés dans tous les sens, il les plaçait sur une table ou sur un autre meuble à sa portée. Ce genre de distraction lui plaisait tant que pas une caisse ne fut ouverte sans qu’il fût là présent.