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Cœur qui gémis, cœur qui divagues,
Cœur sans amour au soir tombant,
Rameurs, escaladez les vagues,
Tous enchaînés à votre banc.





Timbres, cornes, sifflets, tout hurle : « Pas de trêve ! »
Pauvre antidote que le rêve,
Quand chaque heure du jour est un âcre poison.

Foule pareille aux mers qu’un mal obscur tourmente,
Est-ce donc des sursauts d’une course démente
Que le progrès du siècle attend ta guérison ?

Partout la machine halète.
Le monstre, comme un fauve échappant au dompteur,
Aussitôt inventé, domine l’inventeur.
Partout le vent qui vous soufflette,
La pédale au pied, le volant en main,
Et les regards tendus sur le pâle chemin.

Le flot humilié blanchit les hautes proues,
Le rail enfonce au loin son double ruban clair.
A force de tourner, ivres d’oubli, les roues,
Un jour, ont obliqué dans l’air.

Ah ! le mercure baisse au creux du baromètre,
Ton oreille a saigné sous ton casque de cuir !
Qu’est-ce que le nuage a donc pu te promettre ?
Qu’espérais-tu ? t’enfuir ?

Redescends, redescends ! les routes des étoiles
Ne font point de crochet dans les cieux d’ici-bas.
Reviens, l’aile rompue, à ton hangar de toiles,
Et sur le plat gazon reprends ton triste pas.


V


Toi qui maudis ton téléphone,
Ingrat, que tu te connais peu !
Garde-toi du repos, griffonne
Un chiffre encore au crayon bleu.