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La flamme pétillait et la poutre noircie,
Les cuivres, les bahuts, tout était rose et clair.


Vient à passer un jeune garçon, Thomas, fils de maquignon. Les fils de maquignons, ça va de foire en foire, ça voit du monde, ça sait des tas de choses. Thomas s’était glissé dans la kermesse : il reconnaît la Dauphine. Et la Dauphine, reconnue, invoque l’aide de Donald.

Troisième acte. Donald est un hardi pêcheur. Il manie avec sûreté la barque et l’aviron sur ces perfides lacs de montagne. Il a invité Thomas à une partie de pêche. Et parti avec lui ce matin, à l’aube, il revient seul. Royaliste et amoureux, dès qu’il a pu craindre pour la vie de la Dauphine, il n’a pas hésité... Cependant la maison s’emplit de gens qui sont des officiers et de cris qui sont des hurrahs. Le Roi a été exécuté par les soviets ; mais les soviets ont été battus par l’armée blanche. On acclame la Dauphine devenue la Reine. Derechef, on vient la chercher. Elle pleure, elle se débat, elle veut rester dans l’humble maison montagnarde auprès de son gentil camarade Donald. Elle refuse de partir. Alors dans ces mêmes bras robustes sur lesquels il l’avait chargée pour l’exil, le même marquis O’Donnell l’emporte vers sa capitale, vers ses palais, vers la puissance et les grandeurs, hélas !

La pièce est rapide, vive, variée. La langue poétique que M. François Porché fait parler à ses personnages est d’une simplicité extrême, presque familière, sans rien de convenu, sans insistance, sans grandiloquence. C’en est le charme. Ses vers libres, qui sont quand même des vers réguliers, — c’est-à-dire qui sont des vers, — courent et suivent les sinuosités de l’action et de la pensée, sans monotonie et sans bizarreries, sans rien qui déconcerte et rien qui lasse.

Il est fâcheux que la Dauphine n’ait pas trouvé à ce théâtre du Vieux-Colombier, pourtant si intéressant, si joliment hardi et si jeune, l’interprétation qui convenait. Il eût fallu que les rôles d’enfants fussent tenus, sinon par des enfants, du moins par des acteurs qui nous eussent donné l’impression d’être des enfants. L’opposition entre le monde de l’enfance, et notre monde morose disparait. Et, je l’ai dit, c’était toute la pièce.


RENÉ DOUMIC.