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ne réalise pas toujours la nature. Celle-ci n’injecte pas directement dans nos chairs les substances. Elle opère par la voie digestive (comme dans le cas de l’anaphylaxie alimentaire) ou par la voie pulmonaire.

Précisément un asthmatique singulier, observé méthodiquement dans le service du professeur Widal, a permis à celui-ci d’apporter récemment le premier cas rigoureusement démonstratif d’anaphylaxie par inhalation. Il s’agissait d’un marchand de moutons qui, après avoir été en contact pendant trente-cinq ans avec ses animaux, fut pris brusquement et pour la première fois d’une crise d’asthme violente. Depuis lors, les crises d’asthme se répétaient, chaque fois que le malade se trouvait en contact avec des moutons. Il avait fallu trente-cinq ans de ce contact pour réaliser la sensibilisation spécifique de ce malade. On démontra d’abord que c’était bien l’odeur des moutons et nulle autre cause qui déclenchait la crise. Puis on provoqua les crises artificiellement en met-tant le sujet dans une enceinte avec des moutons. Or en prélevant alors une goutte de son sang de quart d’heure en quart d’heure, on constata chaque fois la crise hémoclasique avec tous ses caractères tels que nous les avons définis plus haut. Mais, fait particulièrement remarquable, les modifications sanguines, et notamment la diminution de moitié du nombre des globules blancs, se produisaient longtemps, environ une heure, avant que n’éclatât la crise d’asthme dont le choc hémoclasique constituait donc un précieux signe prémonitoire.

On a retrouvé les mêmes signes, et pareillement prémonitoires, dans des cas d’urticaire alimentaire et dans divers autres cas d’anaphylaxie alimentaire.

La crise hémoclasique apparaît donc comme un indice extrêmement fidèle des accidents anaphylactiques observés en médecine. Le professeur Widal et ses collaborateurs ont montré ensuite que les injections thérapeutiques non seulement des sérums (qui sont des substances albuminoïdes) mais aussi des métaux colloïdaux « tels qu’on les emploie dans beaucoup d’injections thérapeutiques) peuvent se traduire par un choc que révèle la crise hémoclasique du sang, avec ou sans accompagnements de phénomènes morbides sensibles.

Ce qui est remarquable, c’est que la crise hémoclasique précède, et parfois de nombreuses heures, les phénomènes morbides. Cette précession du nouveau signe, du nouveau critère introduit en médecine est un de ses caractères les plus précieux.

Mieux encore, à l’encontre de la plupart des maladies infectieuses