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cathédrale Saint-Jean, et par un sermon de l’évêque de Plock, qui, en présence de la noblesse, se compara au prophète Samuel demandant au Seigneur non un Saül, mais un David.

Le cardinal et les palatins quittèrent ensuite la cathédrale, ils arrivèrent à Whola en procession, et le cardinal pénétra dans le kolo.

A haute voix, il énuméra les candidats, accompagnant chaque nom d’un éloge, s’étendant longuement sur les mérites du prince de Conti, insistant sur le caractère défectueux de l’abjuration de l’électeur et l’impossibilité d’élire un hérétique.

Le cardinal a terminé son discours. Le voici debout devant le szopa ; les mille rumeurs confuses de la foule qui remplit la plaine, s’apaisent, la foule se tait et regarde le cardinal s’agenouiller, prier pour elle, se relever afin de la bénir ; et, tandis que, par quatre fois, au Nord, au Sud, à l’Ouest et à l’Est, sa bénédiction retombe, tous ces gentilshommes, somptueux cavaliers ou pauvres porteurs de faux, turbulente noblesse la plus indisciplinée de l’Europe, courbent le front devant lui.

Du kolo, sort une cavalcade, ce sont les palatins qui vont se mettre à la tête de leurs palatinats. Le cardinal demeure dans l’enceinte avec le directeur de la diète pour compter les suffrages, et chaque palatinat donne son avis. D’abord le palatinat de Cracovie, puis celui de Posnanie ; trois compagnies de Cracovie et une de Posnanie font entendre timidement des cris de Vive le prince Jacques Sobieski ! mais la clameur formidable des autres escadrons les couvre : Vive Conti ! Vive Conti ! répètent à leur tour Vilna, Sandomir, Kalisch. Tout à coup, des acclamations éclatent en l’honneur de Frédéric-Auguste. Les escadrons contistes parlent aussitôt de massacrer les saxons, et, comme chez des Polonais à cheval et en armes, les actes suivent de près les paroles, l’on ne voit bientôt plus dans la plaine des escadrons massés autour de leurs étendards, mais une mêlée furieuse. Les électeurs au galop se ruent les uns sur les autres, se menacent, se frappent même. Papieski, un partisan du prince Jacques, tombe mort aux pieds du cardinal, et le castellan de Kulm échappe à grand’peine à la colère de ses adversaires.

Comment, au milieu du tumulte, de la poussière qui enveloppe les votants, compter les voix ? Le cardinal ordonne à ceux qui tiennent pour Conti de se ranger à droite du kolo, aux partisans