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BOLCHÉVISTES DE HONGRIE [1]

III [2]
LA JÉRUSALEM NOUVELLE


I. — AU PARADIS BOLCHÉVIQUE

Des discours enflammés, d’un enthousiasme mystique, annoncèrent à la Hongrie que le règne du bonheur était venu. « L’humanité, s’écriaient les orateurs bolchévistes, n’a jamais eu devant elle un aussi grand devoir qu’aujourd’hui. Jamais encore on n’a vu une tentative aussi grandiose et hardie que la nôtre, pour renverser de fond en comble tous les principes sur lesquels les hommes ont vécu jusqu’ici. Ah ! certes, il fait bon vivre à cette époque de tempête, où nous entrons pour la première fois dans un monde inexploré. Impossible de reculer maintenant. Nous avons brûlé tous les ponts. En avant, toujours en avant ! De l’ancien monde rien ne doit subsister. Pas de demi-mesure, pas de clémence. L’unique question est de savoir si nous aurons assez de force, de courage et de volonté, pour jeter par-dessus bord toute sensiblerie inutile. Oui, camarades, nous aurons cette énergie, en nous rappelant notre enfance, nos habitations malsaines, notre sombre misère et notre jeunesse sans joie. De l’audace et de la confiance ! Et qu’une seule passion nous anime : l’amour de la Révolution ! »

Ainsi parlaient les prophètes nouveaux, sans toutefois s’appesantir sur l’idée que le Prolétaire souverain, étant encore trop débile pour se conduire lui-même, il lui fallait des maîtres, des

  1. Copyright by J.-J. Tharaud.
  2. Voyez la Revue du 15 décembre 1920 et du 15 avril 1921.