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L’EXPOSITION D’ART HOLLANDAIS
AU JEU DE PAUME

DE REMBRANDT À VAN GOGH

On s’y presse du matin au soir. La salle ne désemplit pas. Le Jeu de Paume des Tuileries a retrouvé la foule des expositions célèbres, peut-être avec une nuance nouvelle d’attendrissement et je ne sais quel charme inédit, en ce mai souriant, sur cette terrasse délicieuse d’où Paris aime à embrasser sa gloire printanière. C’est qu’il y a plus ici qu’une exposition ordinaire. Dans cette trouble Europe mal remise de la guerre, où l’alarme ne se calme plus, où chaque pays se claquemure, où c’en est fait de la douceur des relations humaines, voici la première fois qu’il nous arrive du dehors quelque chose qui sente réellement la paix : la première main tendue sans arrière-pensée, le premier signe de pure gentillesse et de simple amitié.

Le pire désastre de la guerre, c’est l’état de malaise moral qui en résulte. L’ingénieuse Hollande a voulu s’efforcer d’y trouver un remède. Elle en a chargé ses artistes, ceux d’autrefois et ceux d’aujourd’hui et, en pensant aux ruines sans nombre et aux foyers détruits (elle, dont ces chers peintres ne se lassent pas de chanter la poésie intime, le bien-être domestique), elle a voulu que son premier geste fût un geste de charité.


J’ajoute qu’aucun exemple ne pouvait venir plus à propos et que, dans le désordre actuel des goûts et des idées, la leçon de la Hollande était probablement la plus utile à consulter. J’imagine que c’est là le secret de l’accueil que trouvent près du public les maîtres hollandais. Au milieu du chaos de l’art contemporain, dans la confusion des programmes et des systèmes qui bouleversent l’art de