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disons mieux : de même vocation, de même éducation souvent, et que le hasard ou le besoin de gagner leur vie sans délai a fait sonner à une porte plutôt qu’à une autre. Souhaitons que l’appel qui a été lancé, même incomplètement entendu, ne soit pas perdu pour les uns et pour les autres, mais que l’intention en survive, à savoir un désir d’entente et de collaboration. Nous ne devons pas considérer l’enseignement libre comme une nécessité politique et sociale que l’on subit ; mais nous devons voir en lui un associé, un auxiliaire utile qui rompt, par des notes plus ou moins variées, l’uniformité excessive de l’instruction nationale, et dont la souplesse enfin prête à des initiatives dont il nous sera loisible de profiter. Il est la soupape de sûreté prévue dans notre machine pédagogique. On est gardé par lui, parce qu’il pourrait en tirer profit, de toutes sortes de maux, de défaillances, de routines, et de la maladie du sommeil. De pareils « ennemis » valent autant que les meilleurs amis. Comment les agréger dans le système, sans leur ôter justement cette liberté qui est leur raison d’être ? et comment, si on les laisse en dehors, avoir la sagesse de voir en eux autre chose que des concurrents gênants ? Les « compagnons » ont eu au moins le sentiment vif de ce problème.

Tout est-il faux, pour en finir avec la corporation universitaire, dans l’idée d’un « ordre nouveau, » d’un « pouvoir spirituel » que serait l’Université renouvelée ? Nous souffrons du manque d’unanimité, du manque de religion, dans le sens où la religion est ce qui relie. Nous nous demandons quel pourrait être l’organe d’une conscience commune, et si notre Université n’a pas des titres pour cet emploi. Nous avons entendu dire que les universités américaines ont joué dans les grands événements récents un rôle analogue. Et ne serait-ce pas, pour rester chez nous, se souvenir élégamment du passé que de chercher sur la montagne, qui porte le nom de Sainte-Geneviève, la pensée chargée de veiller sur la cité ? Peut-être notre interprétation ajoute-t-elle quelque chose en ce moment à la doctrine des « compagnons. » On ne prête qu’aux riches. Et on ne peut, en tout cas, reprocher à ces universitaires de ne pas croire à leur fonction, à leur mission. Il y a, dans leur langage enthousiaste, lin acte de foi, peut-être un pressentiment.

Une autre idée vraie ou fausse, selon l’usage ou l’abus qu’on en fait, est celle de régionalisme. Et cette remarque ne se borne