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et coiffée de perles, et le prince de Conti portait un habit noir brodé d’or, garni de rubans couleur de feu.

L’après-diner, le prince de Conti reçut les visites dans l’appartement de Monsieur le Prince, son beau-père, où tout était prêt, dit le Mercure, « pour le coucher des épousés. » Le Roi, le Dauphin et la Dauphine, Monsieur et Madame s’y rendirent le soir après souper. La cour, qui les accompagnait, regardait curieusement dans la chambre, la toilette, le dessus de drap d’or et de perles, le miroir, les carrés, les bassins, les flacons de vermeil, et le dessous de point de France descendant jusqu’à un petit tapis de velours vert garni d’une crépine d’or. Ce fut, malgré tant de luxe, la toilette du prince de Conti que l’on admira le plus. Elle était dans le cabinet voisin. Louis XIV en remarqua le brocart d’or mêlé de couleur de feu et de vert, pareil à celui de la robe de chambre. D’ailleurs « tout le déshabillé du prince était si bien entendu et si magnifique, » qu’il attirait tous les regards.

Lorsque la mariée eut pris la chemise des mains de la Dauphine et qu’elle se fut couchée, le marié prit la sienne de celles du Roi et fut conduit par lui auprès de sa femme. Puis le Roi et la cour se retirèrent, laissant le prince et la princesse de Conti sous la courtepointe ornée de dentelle, dans le grand lit de velours cramoisi à bandes d’or, doublé d’une moire d’or brodée d’argent sur un soubassement de point de France.



L’après-dîner du lendemain, 30 juin, le Roi et la cour allèrent voir la mariée sur son lit. C’était alors l’usage, et La Bruyère s’en scandalisait déjà, car il y a toujours quelque contemporain pour partager les étonnements de la postérité.

Le 1er juillet, la princesse fut mise en possession de son hôtel à Paris.

Il s’élevait sur le terrain occupé depuis 1768 par l’hôtel des Monnaies, entre la rue Guénégaud, le quai et l’enfoncement fermé à l’Ouest par le collège des Quatre-Nations. On entrait par une porte qui s’ouvrait sur la petite place, au fond d’une baie ornée, et qui passait pour la plus belle de Paris Au delà de la cour, le salon conduisant au jardin s’illustrait d’un plafond peint par Jouvenet, et le jardin lui-même était digne de sa réputation. Le long de la rue Guénégaud, si lugubre