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nous la retrouverons tôt ou tard devant nous ; let il n’a pas été inutile que M. de Jouvenel en rappelât l’importance.

De son côté, M. Jonnart a porté à la tribune les observations que lui avait suggérées son récent voyage en Orient et que j’avais résumées, par avance, dans ma dernière chronique. M. Briand a reconnu les fautes qui ont été commises dans l’organisation et dans l’exercice de notre mandat syrien, le mauvais recrutement d’une partie du personnel, l’exagération de certaines dépenses. Il a promis la correction des erreurs et la réforme des abus et il a, d’ailleurs, très justement conclu que, malgré les maladresses et les faux pas, la Syrie tout entière avait pleine confiance en la France et qu’elle vivait aujourd’hui dans l’ordre et dans la tranquillité. Après un débat assez vif, le Sénat a approuvé le programme du Gouvernement. M. Jonnart avait dit que l’intronisation de Feyçal en Mésopotamie serait un « acte peu amical » de la part de l’Angleterre. Le Président du Conseil, forcément moins libre dans son langage, a évité de s’approprier ce jugement. Mais il ne manquera certainement pas de s’en servir auprès du cabinet britannique, pour tâcher de détourner de nous le péril que deviendrait rapidement la présence de l’émir sur le Tigre et sur l’Euphrate.

Enfin, M. Briand a été amené à dire un mot du roi Constantin et de Charles IV de Habsbourg. Il a parlé du premier sans indulgence et a plaint les Grecs de leur aveuglement. Il a eu la générosité de ne pas faire allusion à leurs défaites, mais il ne leur a pas laissé l’espoir de notre intervention. Sur l’aventure de Charles IV, le Président du Conseil a été, tout à la fois, sobre et catégorique : « Lorsqu’on a des alliés, a-t-il dit, le meilleur moyen de servir la France est de respecter les engagements pris envers eux. Or, il y avait, dans l’espèce, des engagements pris par nous vis-à-vis de l’Italie, de la Tchéco-slovaquie, de la Yougoslavie, de la Roumanie. Nous les avons respectés et appliqués. » C’est, en effet, M. Jules Cambon, agissant sur les instructions du Gouvernement français, qui a proposé à la Conférence des Ambassadeurs de rappeler au Gouvernement et au peuple hongrois les termes de la déclaration rédigée, dès le 4 février 1920, par les Puissances alliées. Il était formellement dit dans cette déclaration que « la restauration des Habsbourg mettrait en péril les bases mêmes de la paix et qu’elle ne pourrait être ni reconnue, ni tolérée par les Alliés. » La Conférence des Ambassadeurs avait donc renouvelé cette signification, et les Puissances alliées avaient invité le Gouvernement hongrois à prendre des mesures efficaces, « pour