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pas, s’il en est besoin, pour justifier l’agression ; la frontière même du Traité de Riga, en ménageant quelques enclaves. russes en territoire polonais, permettra d’invoquer le principe de l’intégrité nationale.


Ainsi, à travers le Caucase et les provinces baltiques, à travers la Roumanie et la Pologne, c’est toute l’œuvre de paix des Puissances de l’Entente que le bolchévisme veut détruire ; c’est leur régime social et leur avenir économique dont il poursuit le bouleversement et la ruine.

Également mises en péril par cet impérialisme monstrueux, ces Puissances ne peuvent, sans égarement coupable, distinguer parmi ses entreprises celles qui menacent leurs propres intérêts de celles qui ne les atteignent point directement, se prémunir contre les unes et négliger les autres. Puisse l’expérience des événements accomplis et des occasions perdues <ref> Naguère, dans les premiers temps du régime soviétique, les forces anti-bolchévistes dont les concours s’offraient en Russie même et sur ses confins, eussent sans doute réussi à l’éteindre dans son foyer, si une impulsion d’ensemble avait uni leurs efforts. Il eût fallu pour cela que les Puissances de l’Entente se missent d’accord pour leur tracer une règle politique commune et coordonner leurs actions. Loin de là, l’indifférence aveugle ou la prudence apeurée des unes, les tendances divergentes des autres, s’inspirant trop souvent de conceptions égoïstes et trop immédiates, ont permis au Gouvernement soviétique de mettre ces forces successivement hors de cause. L’appui partiel que leur a prêté l’Entente n’a produit d’autre résultat que de faire retomber sur elle la responsabilité des échecs subis et de la déconsidérer aux yeux du peuple russe. <ref> les éclairer sur la conduite à suivre, et sur la nécessité d’adopter un plan d’action commun et d’en poursuivre solidairement l’application !

Il ne s’agit point pour elles, — ainsi qu’on a feint de le croire trop souvent, pour trouver là un prétexte à ne rien faire, — d’aller frapper le mal à sa racine jusqu’à Moscou, et d’organiser à cet effet une intervention de forces alliées. Une telle entreprise ne peut entrer dans leurs vues, elle excède d’ailleurs leurs possibilités actuelles ; elle ne réussirait sans doute qu’à renforcer la situation du Gouvernement des Soviets en exaspérant le sentiment national russe. C’est le peuple russe lui-même qui, le moment venu, renversera le bolchévisme.

C’est donc un programme exclusivement défensif dont l’adoption s’impose aux Alliés. Essayons d’en fixer les lignes principales.