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la défaite de Varsovie, et ouvert une nouvelle phase dans l’évolution du problème russe. Après trois ans de lutte, le gouvernement des Soviets a successivement expulsé de son territoire les forces d’intervention étrangères, mis hors de cause les forces nationales anti-bolchévistes, et purgé la terre russe du dernier garde-blanc. Libéré ainsi à l’intérieur de tout danger militaire ou politique immédiat, dans quel sens le bolchévisme va-t-il orienter son action ?


C’est dans l’essence même de sa doctrine qu’il faut chercher la réponse. Les Dictateurs de Moscou ont jusqu’à ce jour habilement associé dans leurs conceptions le dogme de l’intégrité nationale et celui de la révolution internationale. Ces idées auxquelles ils attribuent leurs succès d’hier inspireront sans doute leurs actions de demain ; la reconstitution de l’Empire russe intégral n’est, du reste, pour eux, qu’un moyen d’affermir leur force en vue du développement de leur propagande internationale. Leur programme n’est donc pas seulement un programme de politique russe, il est aussi, et avant tout, un programme de révolution mondiale. Toutes leurs entreprises, quels que soient leurs objectifs immédiats, concourront au même but : provoquer le bouleversement général de la société pour fonder, fût-ce au prix d’une ruine totale, la domination universelle du communisme.

C’est dire que le bolchévisme ne peut atteindre ses fins que par une action virulente, destructrice de l’ordre social établi. S’il renonce à la poursuivre, s’il cesse même de l’intensifier et de la généraliser, il est condamné à disparaître. L’agressivité est sa loi : pour ne point mourir, il ne peut cesser d’attaquer.

Il dispose à cet effet de deux forces ; l’armée rouge et la propagande. — L’armée rouge a un triple rôle : armée prétorienne, elle assure la domination du Gouvernement des Soviets ; armée du travail, elle régente la vie économique et impose aux campagnes les réquisitions indispensables à la vie des grands centres ; armée de campagne, elle prépare aux frontières les offensives militaires. Elle est à la fois un instrument et la sauvegarde du régime. — La propagande agit sur toute la surface du monde civilisé, pour amener les offensives politiques en soulevant les peuples contre les Gouvernements ; elle est grandement facilitée par la détresse économique dont souffrent aujourd’hui