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Mémoires de Richelieu ne sont vraisemblablement pas encore rédigés, puisque le cardinal recueille des renseignements sur le temps de Henri IV ; que Richelieu a décidé de ne plus écrire lui-même l’Histoire et d’en confier la rédaction à un tiers, que ce tiers n’est pas encore désigné. Nous trouvons le même renseignement dans une relation demandée sur les affaires de la Valteline à un premier commis important de secrétaire d’Etat nommé Paul Ardier, en 1634. Ardier dit qu’il a fait son travail à la demande du cardinal afin « d’aider celui auquel ces papiers seront confiés pour servir à la composition de l’Histoire... Il pourra marcher d’autant plus sûrement, etc.. » Donc, pour Ardier, en 1634, la rédaction des Mémoires de Richelieu n’est pas non plus commencée ; le cardinal a décidé de la confiera un tiers et ce tiers n’est toujours pas désigné. En 1637, Richelieu demande à d’Avaux un récit des affaires auxquelles il a été mêlé depuis 1626 : mêmes observations, mêmes constatations. Bien d’autres personnes ont fourni des relations analogues : Bullion, La Valette, Marillac, d’Effiat, Mazarin, Charnacé, l’archevêque d’Embrun Guillaume d’Hugues, etc.

Ainsi, l’examen des papiers de Richelieu nous fait assister abondamment à la préparation de l’Histoire projetée par le cardinal. Il y a même de premiers classements méthodiques de documents, dans des cahiers, années par années, matières par matières, avec des analyses de pièces rangées chronologiquement constituant ce que Richelieu appelle « des journaux, » le tout œuvre des secrétaires Charpentier et surtout Cherré. Nous avons donc pour le fait de la préparation des Mémoires les renseignements les plus précis, les plus sûrs, les plus explicites.

Au contraire, pour ce qui est de la composition elle-même et de la rédaction proprement dite de l’œuvre, il n’y a rien, absolument rien, pas l’ombre d’une indication ou d’une allusion quelconque.

Nous venons de voir que Richelieu en 1634 ne paraissait pas avoir désigné celui qui écrirait l’Histoire : dans les années suivantes, jusqu’à sa mort, on ne trouve pas d’indice qu’il l’ait désigné : les documents sont muets. Or, en 1635, Richelieu entreprend d’écrire son Testament politique, et il l’entreprend, dit-il, parce qu’il renonce définitivement à rédiger son Histoire. La conclusion s’imposerait donc : jamais Richelieu n’a écrit ses Mémoires. Et en effet Tallemant des Réaux, écho fidèle