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le droit, vous, de vous tromper, mais d’autres peuvent ne pas l’avoir. Renoncez donc, mon cher George, à ces défiances imméritées[1]. » On remarquera cette phrase : Vous avez le droit, vous, de vous tromper, mais d’autres peuvent ne pas l’avoir ; c’est une allusion au livre de Maurice, et aux polémiques qui ont failli diviser une fois de plus F. Buloz et G. Sand.


« LE COQ AUX CHEVEUX D’OR »

Car Maurice a écrit un nouveau livre : Le Coq aux cheveux d’or. Il a envoyé le manuscrit à F. Buloz, qui refuse de l’insérer dans la Revue. De ce refus naît un véritable scandale dans la famille Sand. En vain, Mme F. Buloz, reprenant ses anciennes fonctions de plénipotentiaire, se charge-t-elle de porter elle-même à George la mauvaise nouvelle, l’orage éclate malgré tout.

Pourtant, quelle gentille lettre écrit Mme F. Buloz à George ! Peut-on annoncer une déception, avec plus de tact et de sensibilité ?

« Ma chère amie, mon mari m’envoie cette lettre[2] pour vous. Il est profondément peiné de la mauvaise nouvelle qu’elle vous porte. Son désir le plus vif eût été de vous satisfaire, et de satisfaire Maurice ; il doit vous donner des raisons, quoiqu’il vous juge trop de bon sens, et de justice pour ne pas comprendre son motif, et les impossibilités qu’il vous désigne ; il me demande d’aller vous voir, et vous porter le manuscrit, et surtout de vous dire de vive voix quelle est sa peine, et combien il lui en coûte de vous affliger. J’irai vous voir mercredi à Palaiseau[3] ; dès demain je serais partie, si je ne craignais pas de tomber chez vous à l’improviste, et de déranger quelque projet[4]… »

Voici la lettre de F. Buloz, qui était alors à Ronjoux :

« Mon cher George, j’ai tout lu, et c’est vraiment impossible pour nous. De plus, il est tout à fait regrettable que Maurice, qui a du talent, se jette dans une littérature aussi excentrique,

  1. Collection S. de Lovenjoul, 25 mai 1866, F. 206, inédite.
  2. Voir la lettre suivante.
  3. George, depuis 1865, était installée à Palaiseau.
  4. Communiquée par Mme Lauth Sand. datée : 23 octobre 1803 — sans doute inédite.