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noirs, d’où sortez-vous ? » et puis toujours La Quintinie ! Tout cela ferait bien croire, si l’on n’en était déjà persuadé, à un succès politique ; pourtant à côté de celui-là qui fut bruyant, Villemer eut encore « le succès ; » mais George, bonne démocrate, qui se réjouit aux cris des étudiants anticléricaux, s’émeut aussi à la vision de l’Empereur dans sa loge, pleurant « ouvertement. » La princesse Mathilde aussi est présente, et vient au foyer serrer la main de l’auteur. Pendant la représentation, George Sand, dans la loge de La Rounat, est » entourée aristocratiquement du prince, de la princesse et de la duchesse d’Abrantès (qu’en pensent les étudiants ?) Flaubert est avec eux ; « il pleure comme une femme. » Quant au prince, il « claque comme trente claqueurs, » se jette hors de la loge et crie à tue-tête[1]. »

La foule reconduit George chez elle, chante, l’acclame, puis se trompe, acclame aussi Marie, la petite Berrichonne, et Mme Fromentin, lorsque celle-ci quitte l’Odéon, car on la prend pour George[2]. « Oui, Villemer fut véritablement un événement, » comme l’écrit George à son fils, qui « mit tout le quartier en rumeur[3]. »

Mais George Sand est une amie parfaite, elle souffre de ne pouvoir partager avec A. Dumas son triomphe, et pourquoi Montégut les a-t-il réunis dans son article ? Le succès de Villemer est d’autant plus lourd à porter pour son auteur, qu’il est constamment comparé à l’insuccès de Dumas ; quelle mauvaise idée a eue là, Montégut !

« Dites à Montégut que je voulais d’abord lui écrire, et puis j’ai eu tant de chagrin de l’échec de Dumas fils, et il (Monlégut) a tant ajouté à ce chagrin en accablant la pièce, que je n’ai pas pu me décider à sourire et à remercier[4]. » Comme, après cela, Louis Buloz veut défendre la critique « en somme qu’a fait Montégut ? Exercé son droit de juge, George riposte : « Le coup est plus sensible parce que Montégut est un critique sérieux[5], » pourquoi les mettre, Dumas et elle, dans le même article ? Alexandre Dumas, « malade moralement, » avait

  1. Correspondance de G. Sand, 1er mars 1864, déjà cité.
  2. Idem.
  3. Idem.
  4. Collection S. de Lovenjoul, mai 1864, F. 200, inédite.
  5. Collection S. de Lovenjoul. George Sand à Louis Buloz, 14 mai 1864, F. 227, inédite