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et George, qui géologisait avec Villemer, botanise avec Valvèdre. Son herbier, conservé à Nohant, témoigne d’un goût et d’une recherche délicate.

Le 31 mars, F. Buloz, qui a lu Valvèdre, le nouveau roman de George, avec attention, lui adresse quelques observations prudentes. Et d’abord « il y a beaucoup de talent » dans la partie qu’il vient de lire., .. ; » puis : « Pour faire bien accepter la donnée principale, celle de l’adultère, il faudrait, à mon avis, faire mieux ressortir encore une intention que je crois entrevoir… opposer l’amour chaste à l’amour coupable : il suffirait pour cela de faire intervenir aussi le repentir, au milieu des entraînements de la passion. La générosité de Mosenwald aussi n’est-elle pas un peu exagérée ? (Mosenwald est l’Israélite sublime qui échoue auprès de Mme Valvèdre qu’il adore, et qui soutient après cela de tout son pouvoir les entreprises de son rival.) Je crois que vous feriez bien de modérer la générosité du Juif ; mais ce que je crains le plus, ce sont les rapprochements que l’on ne manquera pas de faire entre Valvèdre et Jacques…, Ne négligez pas, si vous le pouvez, d’éloigner la ressemblance… On me dit que les petits journaux l’ont déjà fait remarquer. On m’assure que c’est le Figaro qui s’est chargé de ce soin, et il serait bon de montrer à ce monde qu’il s’égare[1]. »

Voici la réponse de George :


« 8 avril 1861. Tamaris.

« Mon cher Buloz, j’ai pris en considération vos craintes, et j’ai relu attentivement les épreuves que l’on m’a renvoyées. Je ne crois pas qu’on puisse de bonne foi, — car la mauvaise foi peut toujours dire tout ce qu’elle veut dire, — trouver une caresse à l’adultère, dans le roman de Valvèdre. Comment aurais-je fait fausse route, quand je suis partie de cette idée, non de combattre ni d’excuser l’adultère, mais de peindre la situation d’un homme d’imagination qui trompe un homme supérieur à lui, et qui en est horriblement puni, et par ses remords, et par son propre cœur, qui n’est pas mauvais, et par les circonstances, et par l’amitié, et par la fatalité même.

« J’ai accumulé tous les genres de chagrin sur le coupable, et je l’ai pourtant fait aussi peu coupable que possible, pour rendre

  1. Collection S. de Lovenjoul, inédite.