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beaucoup d’insectes, desideratum Maurice, beaucoup de cailloux, desideratum G. Sand ; à présent voici un roman, desideratum Buloz. » Mais George demande à son directeur de lui laisser publier dans les Débats, pendant que paraîtra ce roman dans la Revue une nouvelle. Ce n’est pas pour son plaisir ! Elle sait aussi bien que lui que le feuilleton n’est pas son meilleur cadre « mais pour des considérations particulières, que vous comprendriez si ce n’était trop long à dire dans l’état de sommeil où je suis. J’ai tant marché depuis huit jours que je dors debout. N’importe, vous me déchiffrerez[1]. »

L’annonce d’un roman de George a, comme d’habitude, enchanté F. Buloz : « Vous êtes une vraie fée, mon cher George, lui écrit-il, le 10 mai, et comment ne pas faire tout ce qui vous plaît ? »

Bien entendu, il cède pour les Débats, et puis : « Je ne connais pas votre pays de Gargilesse qui vous a si bien inspirée et ravie, mais vous devriez venir nous demander l’hospitalité en Savoie, dans le mois d’août ou de septembre, nous vous traiterons le mieux possible. Nous ferons des courses autant que vous le voudrez, vous verrez le pays à votre aise, et peut-être vous fournirait-il un sujet ; on n’a jamais rien fait sur ces pauvres montagnes, et pourtant les mœurs et le paysage peuvent donner lieu à de curieuses observations. Pour moi, je travaille nuit et jour afin de partir le 15 mai pour aller pendant six ou huit jours préparer la maison, et y mettre les ouvriers[2]. » Mais George ne peut aller en Savoie cette année. Nohant est plein de monde, d’enfants, on y joue la comédie. Comment quitter tant d’amis ? Cela n’est d’ailleurs que partie remise, et F. Buloz lui promet, de sa chambre, quand elle viendra, « la plus belle vue qu’on puisse avoir par là : vous plongerez sur le lac du Bourget[3]. »

Quelques jours après, revenant de Ronjoux, il est tout enchanté de son voyage et dit avec admiration. « On va là maintenant en quinze heures I et le pays est bien beau ; mais on est médiocrement satisfait de l’annexion au régime impérial, je ne dis pas à la France, notez bien. Depuis quinze jours, il y pleut par malheur et les paysans disent que c’est M. Laity et l’Empereur qui leur valent ce vilain cadeau, dont ils n’avaient que faire,

  1. Collection S. de Lovenjoul, F, 20, inédite.
  2. 10 mai 1860, inédite.
  3. 10 juin 1860, id.