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incompréhensible sur le fondement de nos droits. Plus nous serons fermes, moins elle sera portée à oublier que nous avons raison. Mieux que tout autre, du reste, M. Viviani saura, au cours de la mission qu’il a reçue du Gouvernement, représenter à l’Amérique que la France continue à mériter l’estime et l’admiration du monde entier, qu’elle n’est pas plus impérialiste aujourd’hui qu’hier, et qu’elle ne peut, sans un véritable déni de justice, être privée des dédommagements qui lui ont été promis.

Mais il est temps que les Alliés ouvrent les yeux à l’évidence, s’ils ne veulent pas laisser pourrir entre leurs mains les derniers fruits de la victoire ; car l’Allemagne, accoutumée, depuis plus d’un an, à notre timidité et à notre candeur, affecte de ne pas encore prendre au sérieux la conduite nouvelle à laquelle MM. Briand et Lloyd George se sont très heureusement décidés. Le Reich s’imagine qu’en multipliant contre nous les défis et les provocations, il dissociera les Alliés et nous ramènera, malgré nous, au régime des transactions bâtardes. Il se trompe. Il a mis notre patience à une trop rude épreuve, et elle est vraiment à bout. Que dire d’une Allemagne qui n’est en règle avec aucun des articles du Traité, qui ne désarme pas, qui ne nous paie pas ce qu’elle nous doit, qui assure l’impunité aux incendiaires et aux meurtriers, et qui cherche maintenant à protester, devant la Société des nations, contre les mesures, encore fort insuffisantes, que nous avons adoptées, pour la contraindre à exécuter ses obligations ? Que dire de ce Gouvernement, prétendu républicain, qui prend avec passion la défense de l’Empire, qui ne reconnaît aucune des fautes commises par Guillaume II et par son entourage et qui cherche à rejeter sur les victimes de l’agression la responsabilité des crimes commis par les agresseurs ? Que dire de cet Empereur lui-même qui, du fond d’un charmant exil, reste en relations constantes avec ses fidèles, dirige des groupes de conspirateurs et fait distribuer des brochures et des tracts pour essayer de démontrer son innocence et pour préparer son retour ?

Cette arrogance de l’Allemagne a naturellement été encore accrue par les résultats inégaux du plébiscite en Haute-Silésie. Là aussi, les Alliés paient maintenant les fautes qu’ils ont commises. Lorsqu’avant la signature du Traité de Versailles, ils ont, malgré l’avis du Président Wilson, consenti à organiser, par l’article 88, une consultation des habitants, au lieu de procéder immédiatement à une délimitation dont les statistiques allemandes leur fournissaient elles-mêmes tous les éléments, ils ont eu l’imprudence d’insérer dans le paragraphe 4