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pouvoir l’accepter, et se terminant par la menace de retirer, si les gouvernements français et anglais persistent dans leur décision, le traité de paix avec l’Allemagne et le traité de garantie franco-américain. La réponse de M. Lloyd George et de M. Millerand, qui vient de succéder à M. Clemenceau, est d’une dignité et d’une fermeté parfaites. Après avoir discuté une fois de plus la solution proposée pour l’Adriatique, elle maintient très nettement l’obligation, pour la France et l’Angleterre, de respecter le traité de Londres, après une guerre qui a eu son origine dans la violation d’un traité signé près de cent ans auparavant ; elle remarque qu’aucune nation n’a le monopole de la moralité, en ce qui concerne les rapports européens et les conditions de la paix ; elle fait enfin ressortir la disproportion entre la question en litige et la menace de M, Wilson de détruire tout l’édifice des traités sortis de la Conférence de Paris. A cette réponse, M. Wilson réplique sur un ton plus modéré, mais sans se départir de son opposition au compromis Nitti ; il déclare toutefois ne pas mettre obstacle à un arrangement italo-yougo-slave, conclu en dehors de toute pression de tierces Puissances. Cette communication clôt l’échange de notes.


XII. — DE LA CONFÉRENCE DE SAN-REMO A LA CONFÉRENCE DE SANTA-MARGHERITA-LIGURE

Après l’échec de la campagne diplomatique de janvier-février 1920, la ressource indiquée par les circonstances, et la seule subsistante, ou peu s’en faut, est une entente directe avec les Yougo-Slaves : une entente recherchée non plus par des voies officieuses, mais par la voie officielle. C’est vers quoi s’oriente le cabinet de M. Nitti, à partir de mars 1920.

A diverses reprises, dans le cours de ce mois que M. Scialoja passe à Londres et à Paris, les journaux annoncent qu’il a rencontré M. Trumbitch et causé avec lui. Vraie ou fausse, la nouvelle prouve que l’idée est dans l’air. Et, en effet, des deux parts on s’y accoutume et l’on se prépare à aborder en tête-à-tète le redoutable problème.

A ce moment prennent un caractère aigu les difficultés surgies entre l’Allemagne et les Alliés, au sujet de l’exécution, ou plutôt de la non-exécution du traité de Versailles et, au début d’avril, la France procède à l’occupation de trois villes de la rive