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Washington. Le Gouvernement américain ne se fait plus représenter au Conseil suprême, comme à la conférence des Ambassadeurs, que par un délégué chargé d’écouter et de rendre compte. Il semble donc normal de reprendre à trois, entre Français, Anglais et Italiens, l’examen de la question adriatique, au même titre que celui des autres questions non résolues. La réunion des trois Présidents du Conseil en fournit l’occasion, et la présence, à côté d’eux, de la délégation serbe-croate-slovène permet des conversations simultanées avec elle. Aussi est-il procédé de la sorte.

M. Nitti est parti de Rome, ayant arrêté les grandes lignes des propositions nouvelles, d’un « compromis » sur des bases sensiblement différentes des projets antérieurs. Les délégués yougo-slaves, M. Pachitch et M. Trumbitch, en reçoivent connaissance dès l’arrivée à Paris du premier ministre italien et avant le retour à Belgrade du Prince Régent, qui est venu en visite en France. Bien qu’ils répugnent à s’en accommoder, l’accueil qu’ils y font laisse espérer qu’ils tiendront compte de l’extrême et légitime désir des Puissances d’en finir avec cette affaire. Dans les entrevues de M. Nitti avec M. Lloyd George et M. Clemenceau, l’entente se fait, le 14 janvier, entre les trois chefs de gouvernement sur les bases suivantes : Fiume sous la souveraineté italienne, sans Sussak remis aux Slaves, sans le port ni le chemin de fer régis par la Société des Nations ; une bande de territoire reliant Fiume à l’Italie ; une rectification vers Senosecchia à la frontière d’Istrie ; les iles de Lissa, Lussin et Pelagosa à l’Italie, mais démilitarisées ; Zara indépendant, avec droit de choisir sa représentation diplomatique ; mandat italien sur l’Albanie diminuée au Nord d’une région remise aux Yougo-slaves et au Sud d’une région attribuée aux Grecs ; Vallona à l’Italie. A la communication officielle de ces propositions, la délégation yougo-slave répond par des objections sur tous les points. M. Nitti fait alors une concession importante, en renonçant à la souveraineté italienne sur Fiume, qui deviendrait ville indépendante dans les mêmes conditions que Zara. Cette concession laisse la délégation yougo-slave indifférente. Aussi bien n’est-ce pas à elle, M. Pachitch n’étant plus président du Conseil, mais au gouvernement de Belgrade qu’appartient la décision. Car ce qu’on a appelé le compromis Nitti lui est soumis le 20 janvier par les gouvernements français et anglais dans