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tout destiné à servir de point de départ et de base à un nouvel examen.

Du mémorandum du 9 décembre, le public italien n’a d’abord connu que la remise à M. Scialoja. De la teneur du document, il n’a su que ce que peut contenir une analyse de quelques lignes, n’insistant que sur la partie négative. Aussi l’a-t-il mal accueilli. Il y a vu une mise en demeure, presque une intimidation ; et, de nouveau, alliés anglais et français ont eu, en Italie, une mauvaise presse, accusés qu’ils furent de se solidariser avec l’associé américain et de se joindre à lui pour un acte de pression. Quand le texte a été intégralement publié, en février suivant, avec celui d’autres pièces du débat, quelques journaux ont convenu qu’il n’y avait pas eu de quoi tant s’offusquer et s’alarmer et que, en tout cas, toute intention de mise en demeure était étrangère à cet acte de courtoise et calme discussion. Mais l’impression première n’a pas été complètement effacée, et, même parmi les Italiens chez qui elle l’a été, il y en a encore beaucoup qui pensent que M. Scialoja aurait mieux fait de se refuser à recevoir ce mémorandum.

Les points sur lesquels l’accord n’apparaît pas réalisé sont la représentation diplomatique de Zara, demandée par l’Italie ; l’indépendance totale de Fiume-ville, détachée de l’Etat-tampon ; le contact direct entre la ville et le territoire italien par une langue de terre le long de la mer ; l’annexion à l’Italie de l’Ile de Lagosta. Comme le mémorandum ne laisse entrevoir de concession possible que sur le premier de ces points, la conversation en reste là, et l’affaire n’a pas fait un pas quand M. Scialoja rentre à Rome.

Faute d’une solution diplomatique, à la suite de laquelle il devienne possible de faire sortir d’Annunzio de Fiume, le gouvernement italien cherche à obtenir le départ du dictateur sans attendre cette solution. Mettant de côté toute considération d’amour-propre, il accepte la conversation avec celui qui l’a si copieusement vilipendé. Rien ne démontre mieux à quel point il est troublé par l’affaire de Fiume et désireux de l’acheminer vers un dénouement. En décembre viennent à Rome le major Giuriati, « chef d’État-major » de d’Annunzio, et le commandant Rizzo, commandant l’ « escadre du Quarnero. » Ils ont des pourparlers avec des membres du Cabinet et, quand ils repartent de Rome, l’entente est considérée comme en bonne voie. La