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Examinons maintenant, très brièvement, les solutions qui ont été proposées pour l’aménagement du Rhône, depuis le lac Léman jusqu’à la mer.

La traversée de Genève présente une première difficulté., Les quais de la ville, et par suite les ponts, sont trop bas pour permettre aux bateaux de passer du lac dans le Rhône sans de grands travaux. Certains projets abandonnent franchement le Rhône et comportent des canaux, des tunnels, des écluses ou des ascenseurs à bateaux. Ces projets ont été soumis à l’arbitrage de M. Le Vallois ; celui-ci a indiqué sa préférence pour le projet de M. l’ingénieur Autran, qui comporte le passage par la rive droite. D’autres projets suivent le Rhône sur une certaine longueur et traversent Genève en tunnel, avec une ou plusieurs écluses. Un projet tout récent consisterait à approfondir le Rhône sous les ponts, de manière à permettre aux bateaux de passer. En ce cas, le Rhône cesserait de remplir sa fonction d’exutoire du lac, et serait remplacé dans cette fonction par un tunnel.

En aval de Genève se pose le grand problème. C’est là que le Rhône, du fort de l’Écluse à Seyssel, est un torrent violent plutôt qu’un fleuve. Dans la plus grande partie de ce parcours, il traverse une gorge profonde, un canon, et même, vers Bellegarde, un peu en amont de cette ville, il coule au fond d’une très étroite fissure, et passe parfois, lors des basses eaux, au fond de cette fissure dont le haut est obstrué par des rochers, de sorte que le fleuve est invisible. C’est la « Perle du Rhône. »

Cette difficulté, insurmontable aux yeux d’un profane, appelle cependant d’elle-même sa solution, qui a été vue, dès 1774, par l’ingénieur Céard. Puisque le Rhône est encaissé entre des parois rocheuses, il n’y a qu’à appuyer contre ces parois un grand barrage qui créera un lac dont les eaux tranquilles iront en amont jusqu’à la frontière suisse. Des écluses, des ascenseurs ou d’autres appareils permettront aux bateaux de passer des eaux du fleuve en aval jusque dans ce lac.

L’idée a été reprise et transformée en un projet sérieux par MM. les ingénieurs Blondel, Harlé et Mähl. Le barrage, placé à Génissiat, aurait une hauteur de 69 à 72 mètres. La chute ainsi créée serait de pareille hauteur et pourrait même atteindre 85 mètres en approfondissant le fleuve en aval. Une puissante