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question se pose de savoir si le mieux est de faire des biefs courts séparés par de faibles chutes, ou de longs biefs séparés par de grandes chutes. Le grand bief et la haute chute permettent mieux le captage de l’énergie du fleuve, mais rendent difficile le passage des bateaux. Cependant, cette dernière solution est en faveur auprès d’éminents ingénieurs, comme M. l’inspecteur général Tavernier et M. le commandant Le Vallois. Celui-ci préconise le passage des grandes dénivellations en faisant entrer les bateaux dans un bassin mobile porté par des roues et pouvant parcourir un plan incliné. Ce bassin, ce sas-chariot, serait mû par l’électricité ou par un moyen mécanique quelconque. Il viendrait se plaquer à l’extrémité du plan incliné contre le bief supérieur ou contre le bief inférieur et, en ouvrant les portes étanches du bief et du bassin mobile, le bateau n’aurait qu’à passer du bief dans le bassin, ou inversement. Ce système évite les pertes d’eau nécessitées par les écluses.

Comme il faut prévoir la jonction du lac Léman au Rhin, et la traversée de ce lac sur 40 kilomètres, les chalands, pour n’être pas arrêtés par les gros temps, devront être toujours pontés, et les remorqueurs devront être munis de machines bien abritées.

Enfin, il faut dire quelques mots d’une question qui, sans être essentielle, est cependant importante. Il serait très utile, pour la réalisation des divers projets, de pouvoir mieux régulariser le débit du Rhône en augmentant la tranche d’eau réglable du lac Léman. Actuellement, ce lac est fermé, à Genève, par un barrage qui permet normalement de disposer d’une tranche d’eau de 0 m. 60, ce qui donne une réserve disponible de 349 368 000 mètres cubes. Cette réserve est accumulée à l’époque où la fonte des glaciers alimente largement le Haut-Rhône valaisan, qui forme le lac. Pendant les basses eaux, en hiver, quand les glaciers ne fondent plus, cette réserve est employée pour ajouter au fleuve, à sa sortie du lac, 100 à 150 mètres cubes à la seconde, au grand avantage des usines hydrauliques existantes et de la navigation. Des pourparlers avec la Suisse pour l’augmentation de la tranche réglable se sont heurtés à certaines objections, surtout de la part du canton du Valais. Ces pourparlers seront vraisemblablement repris prochainement.