Page:Revue des Deux Mondes - 1921 - tome 62.djvu/638

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui avait capté la plus grande puissance hydraulique. Elle avait aménagé 750 000 à 1 000 000 de chevaux [1]. Pendant la guerre, selon M. le commandant Cahen, dans son rapport général sur l’industrie française pour 1919, la France a encore installé 850 000 chevaux, en y comprenant les installations en cours destinées à être achevées en 1920. Le total des installations serait donc de 1 600 000 chevaux. C’est déjà beaucoup, mais il y a encore plus à faire, car, selon M. l’inspecteur général de la Brosse, qui dirigeait le service d’étude des forces hydrauliques au Ministère de l’Agriculture, la France peut aménager de 9 à 10 millions de chevaux dont le tiers environ pour la région des Alpes, en y comprenant le Rhône. Pour ce fleuve, un mémoire publié en 1919 par le Conseil supérieur des Travaux Publics évalue sa puissance pouvant être aménagée à 784 000 chevaux en eaux moyennes.

Or, il n’existe sur le Rhône qu’un très petit nombre d’usines génératrices : la Coulouvrenière et Chèvres en Suisse, Bellegarde et Jonage en France. La plus importante emploie au maximum 20 000 chevaux.

L’importance du captage de l’énergie hydraulique, de la « houille blanche, » est facile à saisir. En effet, la houille blanche et la houille noire se remplacent l’une l’autre dans beaucoup de cas. L’électricité provenant d’une chute d’eau peut être transformée en chaleur. Surtout, cette électricité, de même que la houille noire brûlée dans une machine à vapeur, peut se transformer en force mécanique. Il est donc possible de comparer l’énergie d’un fleuve à celle que peut produire le charbon d’une mine de houille. Voici, à cet égard, les résultats auxquels arrive M. l’inspecteur général Tavernier.

En 1912, la France a consommé environ 40 millions de tonnes de charbon français et 20 millions de tonnes de charbon étranger, au total 60 millions de tonnes. En ne prenant que le charbon employé à donner de la force (machines à vapeur industrielles, chemins de fer), il a été consommé 9 millions de tonnes par les chemins de fer, et 18 millions par l’industrie, soit au total 27 millions de tonnes.

Or, à eux seuls, les cours d’eau des Alpes permettraient de

  1. Le chiffre le plus fort est cité par M. Marius Richard, le plus faible par M. le commandant Cahen. Les divergences proviennent de la difficulté de procéder aux évaluations, et des méthodes différentes employées.