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orientale, de celles en provenance ou à destination des ports de la mer Noire et de la Méditerranée, et même de nombreux ports des Amériques et de l’Afrique occidentale. Ceci suppose naturellement le Rhône joint dans de bonnes conditions au Rhin, soit par le canal actuel agrandi, soit par le lac de Neufchâtel. Il est même probable que cette grande artère fluviale joignant la Méditerranée à la mer du Nord prendra une telle importance que, non seulement la navigation du Rhin n’en sera pas atteinte, mais en sera accrue.

C’est ici le moment d’examiner une étrange objection qui a été formulée par plusieurs parlementaires. La jonction du Rhône au Rhin, spécialement par la Suisse, aboutirait à prolonger jusqu’à Lyon les canaux du Rhin au bénéfice de Hambourg. N’insistons pas sur la situation de Hambourg, fort éloignée du Rhin. Si l’objection était sérieuse, il faudrait supprimer toutes les voies ferrées internationales et clore le pays par une muraille. Il faudrait que les importations fussent toujours nuisibles ; or, personne ne contestera qu’elles sont souvent nécessaires. En outre, les importations de produits qui se réexportent après avoir été manufacturés sont toujours utiles. Enfin, la grande voie d’une mer à l’autre recevra un fort transit qui ne s’arrêtera pas en France, mais qui y laissera un bénéfice net.

La vérité, c’est que la France doit développer puissamment son commerce et son industrie, soit à l’intérieur, soit dans ses rapports avec l’étranger, et que, pour atteindre ce but, de bonnes voies commerciales intérieures et internationales sont indispensables.

Puisque nous parlons du Rhin, une comparaison du Rhône avec lui s’impose.

Les deux fleuves présentent de nombreux points de ressemblance. Tous deux proviennent de glaciers voisins, sont régularisés et épurés par de grands lacs, ont, dans leur cours supérieur, leurs hautes eaux à la fonte des glaciers, reçoivent ensuite des affluents provenant des régions tempérées, et dont les hautes eaux se produisent en d’autres saisons, ce qui régularise le cours inférieur du fleuve. En revanche, il faut noter que le Rhin, né au même niveau que le Rhône, présente un cours deux fois plus long, donc une pente deux fois moins rapide, et que ses eaux sont beaucoup plus abondantes. Pour ces deux motifs, le Rhin s’est prêté plus facilement à la navigation que