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où l’on allait à la messe, et l’on y allait le jeudi et le samedi, ou lorsqu’il arrivait quelque fête de dévotion, ou enfin lorsque Messeigneurs le désiraient. « On est bien aise, explique Lancelot, de donner lieu au Saint-Esprit d’agir sur leurs petits cœurs, et que leur dévotion ne soit point forcée. »

Les dimanches et les grandes fêtes, l’explication de l’épître et de l’évangile, la messe de paroisse, le catéchisme qui consistait, non en leçons apprises par cœur, mais en un exposé des mystères qui plaisait beaucoup aux enfants, occupaient la journée. Les fêtes non solennelles, quelques heures de récréation suivaient la messe et les vêpres, et l’on expliquait des auteurs chrétiens. Conti prenait Sulpice-Sévère et La Roche-sur-Yon quelques hymnes ou quelques homélies des Pères de l’Eglise, « car on les rompait dans toute sorte de latin, » à moins qu’il ne leur fût plus agréable de lire un livre de piété en français.

Lancelot semble avoir oublié les congés. Il ne les a pas oubliés, il les a jugés inutiles. Il craignait d’entretenir ses élèves dans une certaine oisiveté, où « ni eux, ni ceux qui les regardent, pensait-il, ne sauraient que faire pour attraper la fin de la journée. » Les Grands d’ailleurs selon lui avaient assez de temps chaque jour pour se divertir. Les voyages à Saint-Germain, tels et tels événements extraordinaires remplaçaient les congés. Les princes de Conti eurent ainsi la distraction, le 2 juillet 1671, au château de Saint-Germain, d’assister à l’étude du Dauphin, qui avait alors dix ans, et dont Bossuet était le précepteur. Leur cousin était assis sur sa chaise, et, derrière lui, se tenait debout le bon valet de chambre Dubois, tout fier de pouvoir, malgré ses soixante-douze ans, demeurer sur ses jambes trois heures le matin et trois heures le soir, comme il l’avait fait, jadis, pendant les leçons de M. de Péréfixe à Louis XIV enfant. Le vieux serviteur ne devait pas perdre un mot de ce que disaient le maître et l’élève, car il a noté, avec beaucoup de soin, dans son journal, que « Monseigneur expliqua en latin et en français la chute de David et de Bethsabée, la mort d’Uri, comme Absalon tua son frère et la raison du viol de sa sœur Thamar, la révolte d’Absalon, la vanité de David dans le dénombrement de ses troupes, sa pénitence » . Espérons que, ce jour-là, le Dauphin ne fut pas, ainsi que cela lui arriva le 22 août suivant, au grand désespoir de Dubois, frappé de coups de férule par son gouverneur, l’austère duc de Montausier,