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Dans l’élégante demeure, théâtre de tant de fêtes, qui avait retenti du rire de Molière, aux jours déjà lointains de 1653, où Mme de Calvimont goûtait, auprès de son amant, le plaisir de la comédie, le prince de Conti rentrait pour mourir. Il y expira le 21 février 1666, avec les sentiments de la piété la plus vive, à l’âge de trente-six ans. Ses restes furent portés en grande pompe aux Cordeliers de Pézenas, en attendant d’être inhumés à la Chartreuse de Villeneuve-les-Avignon.

La princesse de Conti s’était retirée au couvent des Carmélites de Narbonne. Elle se préparait à revenir à Paris.

Cette veuve, jeune et belle, n’allait plus vivre que pour ses enfants. Elle leur donna, pour les élever, deux ecclésiastiques : du Trouillas, ancien précepteur du comte de Saint-Paul, fils de Mme de Longueville, au prince de Conti ; Lancelot, au prince de La Roche-sur-Yon. Mais très vite, du Trouillas, torturé par de violents maux de tête, avait entrevu le moment où il serait obligé de renoncer à sa mission. Vers la fin du printemps 1671, alors que François-Louis entrait dans sa huitième année, les enfants étaient confiés à Lancelot, sous l’autorité d’un gouverneur, Montfaucon, sieur de Lapejan, et du Trouillas suppléait seulement, à de certains jours et à de certaines heures, le professeur en titre. Des deux frères, Louis-Armand de Bourbon, prince de Conti, et François-Louis de Bourbon, prince de La Roche-sur-Yon, c’est le second qui nous intéresse. Encore quelque vingt ans, le prince de Conti d’aujourd’hui mourra, et La Roche-sur-Yon s’appellera à son tour le prince de Conti.


Le gouverneur, choisi par la princesse, était un gentilhomme de vieille race gasconne, demi-frère de l’illustre bénédictin Bernard de Montfaucon. Ils avaient l’un et l’autre pour père ce Timoléon de Montfaucon, dont on citait la noble réponse au duc de Montmorency qui le pressait de le suivre dans sa rébellion : « Monseigneur, mon âme est à Dieu et mon épée au Roi. » Quant à Lancelot, l’un des solitaires de Port-Royal, demeuré diacre par humilité, il était âgé, en 1671, de cinquante-six ans, et connu comme le maître des fameuses Petites-Ecoles. De plus, ayant été précepteur du duc de Chevreuse, il avait l’expérience de l’enseignement particulier. C’était un grammairien