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meilleure qu’au 11 novembre 1918. Le 3 mars peut devenir une date décisive dans l’histoire du relèvement de l’Allemagne. » Que vingt-huit mois après la capitulation des armées allemandes, la presse d’outre-Rhin parle du chef d’un des Gouvernements alliés sur ce ton grossier, c’est un symptôme qui nous permet de voir clairement à quel point nous avons gaspillé notre victoire et gâché la paix. Nous avons nous-mêmes entretenu cette arrogance ; elle s’accentuerait demain, si nous ne reprenions pas avec énergie l’exercice de nos droits.

Tout en fulminant contre le Premier ministre britannique, les Allemands n’ont pas oublié, du reste, qu’Achille n’avait pas été baigné tout entier dans les eaux du Styx et ils ont découvert sans peine le point vulnérable où ils pourraient frapper. M. Lloyd George avait terminé son ardente harangue par une péroraison lénitive : « A moins que lundi prochain, à midi, nous n’apprenions que l’Allemagne est décidée ou à exécuter les décisions de Paris ou à soumettre des propositions qui lui permettraient de remplir par d’autres modalités également satisfaisantes les obligations qui lui incombent du chef du traité de Versailles, sous réserve des concessions accordées à Paris, nous prendrons, à partir de la date précitée, les mesures ci-après : 1° Les villes de Duisbourg, Ruhrort et Dusseldorf, sur la rive droite du Rhin, seront occupées ; 2° Les Alliés demanderont à leurs Parlements respectifs les pouvoirs nécessaires pour obtenir de leurs ressortissants qu’ils paient à leurs différents Gouvernements une certaine proportion de tous les paiements dus à l’Allemagne sur des marchandises allemandes, cette proportion devant être retenue dans les pays au compte des réparations ; 3° Le montant des taxes encaissées par les postes douaniers allemands sur les frontières extérieures des territoires occupés devra être versé à la Commission des Réparations. Une ligne de postes douaniers sera établie provisoirement sur le Rhin et aux limites des têtes de ponts occupées par les Alliés. »

Les Allemands n’ont pas pu ne pas remarquer, d’abord, que dans les sanctions qu’on leur signifiait ainsi, il n’était plus question de la garantie qu’on avait annoncée, en première ligne, après les accords de Paris : la prolongation de l’occupation de la rive gauche ; et ils se sont dit évidemment que, faute de cette prolongation, les gages qu’on se proposait de prendre sur eux seraient bien précaires et bien illusoires. Mais, en outre, l’élasticité des mots : « autres modalités satisfaisantes » a, tout de suite, permis à M. Simons de faire