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Allemand qui devait désormais regarder comme un mauvais chiffon de papier le parchemin que les Alliés venaient de couvrir, en français et en anglais, de quatre cent quarante articles, de plusieurs annexes et d’un protocole complémentaire.

Les concessions successives auxquelles, depuis lors, nous nous sommes laissé entraîner, M. Lloyd George les a toutes énumérées dans la juste et sévère admonestation qu’il a adressée, le 3 mars, à la délégation allemande. Il s’est plu à les rappeler pour montrer au monde la longue patience dont nous avions fait preuve, et cette démonstration n’était peut-être pas sans intérêt pour les gens de bonne ou de mauvaise foi qui, à l’étranger, accusaient la France d’impérialisme. La modération dont nous nous prévalons ainsi ne nous en a pas moins coûté fort cher. Elle a peu à peu ramené les Allemands à leurs positions du mois de juin 1919. Au lieu de donner à ceux d’entre eux qui s’obstinent à ignorer leur défaite et qui cherchent à maintenir le peuple dans l’admiration de la force germanique, l’impression nette que notre droit est lui-même assez fort pour se faire respecter, nous avons, à plusieurs reprises, bruyamment annoncé des sanctions que nous n’avons pas appliquées. Nous avons menacé, au lieu d’agir, et nos menaces n’ont été suivies d’aucun effet. Il n’y avait rien qui nous pût déconsidérer davantage aux yeux de l’Allemagne. L’occupation de Francfort elle-même, qui, à un moment donné, soulagea notre opinion publique, n’eut pas l’influence que nous espérions, parce qu’elle fut momentanée et qu’elle fut ensuite exploitée contre nous comme une preuve d’impuissance. Nous avons complètement méconnu la psychologie allemande. Nous avons cru que nous nous concilierions le gouvernement du Reich par des sourires. Il a pris nos révérences pour une reculade et il a foncé sur nous. De conférence en conférence, il a gagné du terrain et nous en avons perdu.

Les Allemands ont naturellement pensé que, les Alliés consentant à la révision du Traité, le Traité devait être tout entier révisé dans le sens des observations présentées en 1919 par Brockdorff-Rantzau et, pour donner plus de chances de succès à cette campagne, ils ont, depuis quelque temps, renouvelé leurs anciens efforts pour se décharger de toute culpabilité dans la guerre, et des articles significatifs de la Deutsche Allgemeine Zeitung ont préludé à la reprise de cette propagande. Comme l’a dit éloquemment M. Lloyd George, M. Simons lui-même a fait acclamer dans toute l’Allemagne la répudiation des responsabilités qui pèsent sur le Reich, et il a jeté ainsi à l’histoire et à