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mise en vigueur du Traité, l’Allemagne nous donnait à entendre qu’elle n’était pas plus disposée à exécuter l’article 228 que l’article 231. Elle signalait aux Alliés le « grave ébranlement » que produirait chez elle la livraison des coupables et elle proposait, à titre de transaction, qu’une instruction fût ouverte contre les armées devant le tribunal d’Empire de Leipzig. Les Alliés commencèrent par esquisser un geste d’énergie. Ils remirent, le 3 février, les noms des coupables à M. de Lersner, chef de la délégation allemande ; mais M. de Lersner retourna aussitôt le papier à M. Millerand, Président du Conseil, et quitta Paris sur le champ. Le Gouvernement allemand désavoua M. de Lersner, mais il obtint qu’une négociation fût ouverte. Une conférence interalliée se réunit à Londres, et il y fut admis que la note allemande du 25 janvier, d’abord repoussée par l’Angleterre et par nous, était acceptable et que, pour le moment, nous nous en rapporterions à la bonne foi de l’Allemagne. Il était seulement ajouté que, si l’instruction du tribunal impérial n’était qu’un simulacre, les Alliés se réservaient de saisir leurs propres tribunaux. Où en sont maintenant ces informations ? Quelles sont les condamnations intervenues ? La liste sinistre dont parlait si justement M. Léon Bourgeois est devenue, aux yeux des militaristes allemands, une sorte de tableau d’honneur, et notre faiblesse a assuré aux plus abominables forfaits une scandaleuse impunité.

Pour les fournitures de charbon, les accords de Spa n’étaient pas moins propres à encourager les prétentions allemandes. Dans son rapport à la Chambre des Députés, M. Louis Dubois, aujourd’hui président de la Commission des réparations, avait exposé que les obligations imposées à l’Allemagne par l’annexe V se justifiaient par la destruction « systématique et scientifiquement sauvage » de nos mines du Nord et du Pas-de-Calais. En compensation du mal qui nous avait été fait, nous devions recevoir une quantité de charbon correspondant à celle qu’auraient produite les mines détruites. Le 30 juin 1920, la Commission des Réparations signalait officiellement aux Puissances la violation mensuelle du Traité et demandait qu’il fût pris des mesures de contrainte. Sur quoi les Alliés se réunissaient à Spa, du 5 au 16 juillet, et, au lieu d’appliquer des sanctions, ils réduisaient le chiffre à livrer mensuellement par l’Allemagne ; ils accordaient au Reich une prime de cinq marks or par tonne et ils lui promettaient, pendant six mois, des avances importantes. En retour de ces sacrifices immédiats, il nous était laissé une illusion. L’article 7 de l’arrangement portait : « Si, à la date du 15 novembre 4920, il était constaté